Ce film est sans aucun doute le chef d'œuvre de Billy Wilder, testament noir et en même temps déclaration d'amour à un cinéma oublié. Le film est pourtant d'une noirceur et d'un cynisme rarement atteint au cinéma apparaissant comme un film noir sans concession.

Norma Desmond, ancienne star du cinéma muet, embauche Joe Gillis un scénariste fauché et prêt à tout pour rembourses ses dettes. Son travail étant de préparer le scénario écrit par Desmond, il s'installe dans la villa de la star mais très rapidement ce travail relativement simple va être remplacé par une relation malsaine entre l'actrice déchue et le scénariste raté. Ce sera sans compté son majordome, Max, éternel serviteur dévoué à la star.

"Boulevard du crépuscule" est tellement complet que je ne sais par où commencer. L'aspect visuel du film est soigné, cette villa fastueuse sur Sunset Boulevard est l'héritage direct de Welles et de son Xanadu dans Citizen kane. Avec ses grandes volées d'escaliers dignes de « La splendeur des Amberson », il est difficile de ne pas sentir toute la grandeur des années 20. Le film a le mérite de montrer l'envers du décor, avec les tournages de la Paramount et la mise en abîme d'un tournage dirigé par Cecil B. DeMille en personne.

Mais au-delà de l'image, le film présente un propos mature et très cru sur Hollywood. Traitant de la difficulté des acteurs et des actrices à vieillir et à accepter de perdre la vedette au profit d'artistes plus jeunes, il lance, comme un pavé au milieu de la mare, une vérité difficile à admettre. Hommage vibrant au cinéma muet, Sunset Boulevard transpire de nostalgie et quand, pendant une partie de bridge, on voit les visages inexpressifs d'un Buster keaton, d'Anna Q. Nilsson ou de H.B. Warner, il est difficile de ne pas être ému.
Il traite à la perfection de la déchéance qu'on vécut ces acteurs incapables de s'adapter au cinéma parlant, dénonçant Hollywood comme un monstre qui a broyé des acteurs comme Fairbanks.

Si dans le film Desmond à tourner sous la direction de DeMille en personne, la réalité n'est pas loin. Car dans le rôle de Desmond, on retrouve Gloria Swanson qui a elle-même tourné pour DeMille et même pour Von Stroheim qui interprète le rôle du majordome Max qui (dans le film) a été le premier réalisateur à faire connaître Desmond. La boucle est bouclée.

Au final, Billy Wilder arrive à rendre la frontière entre réalité et fiction quasi inexistante grâce a des mises en abîmes judicieuses. Et quand Desmond-Swanson descend les escaliers de sa fastueuse villa face aux regards médusés des journalistes et des policiers, et que Max-Von stroheim se tient à coté des caméras suivant son déplacement, alors « la magie du cinéma » se produit. Elle finit par tendre les bras vers la caméra, comme pour nous inviter à la rejoindre car dans sa villa le temps s'est arrêté et est resté bloqué dans les années 20 et on se surprend a rêver avec Norma Desmond de cette période de folie et de gloire.
CREAM
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le 5 sept. 2011

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