"I'm Dirk Diggler. I'm the star. It's my big dick and I say when we roll."

En guise de préambule, je tiens à préciser que je suis un fan inconditionnel de Paul Thomas Anderson, que Magnolia est mon film préféré, et donc, si je manque de discernement lorsque je parle de lui, il faut d'avance m'en excuser.
Maintenant que cela a été précisé, je peux commencer ma critique.

Ce film est une réussite complète. Autant le premier visionnage (il y a au moins 3-4 ans) ne m'avait pas marqué plus que ça, autant ce second s'est avéré carrément génialissime.
On a souvent reproché à Paul Thomas Anderson de fortement s'inspirer de certains cinéastes, comme Kubrick, Scorsese ou Altman. Et ce n'est pas à tort. Pour preuve, c'est un film très Scorsesien que nous propose Anderson ici. On pense forcément à Raging Bull, de par son schéma narratif (ascension puis chute du personnage principal), mais surtout lors de la scène où Wahlberg, en costard, s'adresse à un miroir. Cependant, Anderson a suffisamment de talent pour nous proposer beaucoup plus qu'un simple plagiat.

Comme le répète à longueur de temps Eddie Adams dans le film: "On a tous un don, il faut juste savoir reconnaître lequel". Pas besoin de vous faire de dessin pour que vous deviniez à quoi le personnage de Mark Wahlberg fait allusion ici. Ainsi, la première partie qui montre l'ascension d'un jeune homme dans le milieu du X, se révèle assez fun. Cette première partie, qui dure quasiment 1h30, se déroule sans le moindre temps mort, et est appuyée par une BO quasi-parfaite, mélangeant tous pleins de tubes des 70's et 80's. Ayant beaucoup trop de différents avec sa famille génitrice, Eddie Adams, maintenant star, a trouvé sa "vraie" famille: Amber, la "pro" du métier, sera en quelque sorte sa nouvelle mère. Devenu, Dirk Diggler, il enchaîne les succès. Son patron et mentor, Jack Horner (interprété par Burt Reynolds) est tellement sûr d'avoir trouvé la perle rare qu'il donne même un rôle récurrent à Dirk dans une série porno-policière.
Malheureusement, tout cela ne dure qu'un temps. Les 3/4 d'heures suivants relatent la chute de notre star du X, dont l'ego est devenu surdimensionné. Il s'idolâtre, et se considère comme étant tout simplement le meilleur du métier. Diggler devient peu à peu antipathique. La BO du film, se fait alors beaucoup moins "joyeuse". Dirk sombre dans les drogues, initié à la pratique par Amber Waves (Julianne Moore). S'engueulant avec Jack, il se casse, rappelle à Amber qu'il n'est pas son fils (ce qui est d'autant plus dur, lorsque l'on connaît la vie personnelle de la jeune femme) et se met à faire de la musique avec son pote Reed, ou s'engage dans des plans foireux, en dealant de la cam'.
Cependant, avec la "chute" de Dirk, c'est également le virage que doit prendre le porno à cette époque-là qu'Anderson dessine habilement. Ainsi, le début de la vidéo et de l'amateurisme pousse l'industrie à se réinventer. Certains acteurs de ce "sous-genre" sont alors laissés sur le tapis et voient leur rêves s'envoler: Ainsi, Julianne Moore n'aura jamais la garde de son enfant, son présent d'actrice X et ses arrestations passées pour prise de drogues joueront toujours contre elle.
Enfin, dans les dix dernières minutes, tout s'arrange plus ou moins: Dirk demande pardon à Horner, qui lui accorde, Rollergirl se remet aux études, Maurice Rodriguez peut ouvrir son club, Buck et sa femme ont un enfant, et Amber retrouve son second enfant, Dirk, de retour à la "maison"..

C'est un film maîtrisé de bout en bout que nous propose ici Anderson. Ainsi, on a le droit à quelques beaux mouvements de caméras, et particulièrement à quelques plans-séquences prodigieux. Il est impossible de ne pas citer celui qui fait guise d'ouverture au film, dans lequel Anderson nous présente quasiment tous les personnages que nous serons amenés à côtoyer au fil de l'histoire.
A côté de ça, le cinéaste se permet quelques moments de folie, notamment lors de la scène où Wahlberg, C. Reilly et Thomas Jane viennent vendre de la drogue à Alfred Molina, aux fortes influences Scarfaciennes, ne serait-ce que dans les décors, le look et le personnage déjanté de Molina. On se mitraille et se tue à tout va. Et puis quelle formidable idée que ces "coups de feux" à répétition (il faut avoir vu le film pour comprendre).
Et pour en revenir à la musique, qui comme je vous le disais au tout début est composée de tubes des seventies et eighties (ne comptaient pas sur moi pour vous donner le moindre titre, je peux juste vous dire qu'il y a la musique de la pub "fertiligène", alors ne vous moquez pas), elle est ici très réussie. Et contrairement à Magnolia, l'approche musicale choisie par Anderson semble différente. Dans Magnolia, la musique semblait jouer un rôle à part entière dans l'ensemble du film. Ici, la musique semble s'adapter à l'époque et à l'histoire racontée.
Enfin, la brochette d'acteurs (qui sont pour la plupart d'entre eux sur le Magnolia du même réalisateur) est remarquable. Mark Wahlberg joue probablement le rôle de sa vie. Julianne Moore n'est également pas en reste, et parvient à rendre son personnage attachant, voir même à nous émouvoir. C'est surement le personnage le plus "humain" du long-métrage selon moi. C'est d'ailleurs le seul qui semble capable de transmettre un véritable amour, sentiment en total opposition avec le milieu du X, où "faire l'amour" ne signifie absolument rien. Burt Reynolds, dans un rôle à contre-emploi, est également très bon. Mais n'oublions par John C. Reilly, l'un des seuls amis de Dirk, Don Cheadle, Heather Graham alias Rollergirl, Philip Seymour Hoffman le gay en quête d'un amour impossible, Alfred Molina et son interprétation proche d'un Tony Montana au bord de la folie, Luis Guzmán, Melora Walters, Thomas Jane - méconnaissable - et William H. Macy, en mari au bord de la crise de nerfs devant les parties de jambe en l'air de sa femme, qui le trompe littéralement sous ses yeux.. Ils sont tous brillants.

Malgré des influences évidentes, Boogie Nights est donc bien plus qu'un plagiat, ou au mieux, un film hommage. Le cinéaste possédant une palette suffisamment grande pour ne pas se laisser prendre à un tel piège. C'est donc un film remarquable que nous pond Anderson pour son second film, et nul doute que ce mec laissait déjà entrevoir un talent certain. Ici, on ne s'ennuie pas une seconde, et je ne peux que vous conseiller cet objet cinématographique, qui n'a absolument rien à envier à ceux des plus grands.
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le 3 janv. 2013

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