Je le balance tout de suite... je suis heureux d'avoir été payer un ticket de cinéma pour aller voir ce film (même si la caissière était aussi aimable qu'un gardien de goulag !). D'accord, ce n'est pas celui du siècle. D'accord, ce n'est pas exempt de défauts (sur lesquels je vais revenir plus loin !). Mais des divertissements comme ceux-là dans le cinéma français, j'en prendrais bien plus souvent.


Par où commencer ? Euh... alors Jonathan Barré réalise ici une comédie policière d'humour noir qui fait référence à des œuvres cultes comme Usual Suspects, Psychose, Se7en, Les Oiseaux ou encore Drive, tout en détournant habilement chacun de ces clins d'œil pour les rendre drôles, tout en les intégrant pour qu'il paraisse couler de source dans une intrigue qui n'est pas avare en rebondissements et révélations.


Bonne conduite nous conte l'histoire d'une formatrice dans un centre de récupération de points le jour, qui, la nuit tombée, a une manière personnelle de régler ses comptes aux chauffards : leur donner un aller simple dans l'autre monde, au volant de son bolide. Autour de ce fil conducteur, il y a un trafic de drogue, la vengeance de deux cousins, une affaire de radars détruits, un ostréiculteur divorcé amoureux...


**


Tout en continuant à employer Grégoire Ludig et David Marsais, tous les deux dans des rôles secondaires d'enquêteurs d'un flair assez faillible (ouais, en fait, ils sont cons !), Barré s'éloigne du Palmashow pour faire une petite cuisine plus personnelle. Et cela s'incarne particulièrement dans le personnage principal, joué brillamment par l'excellente, charmante et charismatique (comme d'hab !) Laure Calamy, qui, depuis quelques années, a prouvé qu'elle était totalement capable de porter un film sur ses épaules.


Notre personnage est un être déterminé, allant jusqu'au bout de ses objectifs, avec, de temps en temps, une maladresse qui le rend aussi marrant que touchant. Oui, parce qu'en route, Barré n'oublie pas de provoquer un lien émotionnel avec le spectateur, qui comprend les motifs de notre vengeuse cagoulée et qui (en dépit du fait que ce soit une tueuse en série un brin barrée... OK, je sors !) les approuve. En conséquence, l'équilibre est bien trouvé entre les deux registres. On peut rire à gorge déployée tout en ressentant intérieurement de la peine, comme c'est le cas lors des "apparitions" de Thomas Ngijol. Rien n'est plus près de la comédie que la tragédie. Calamy joue avec brio sur toutes ces facettes. S'il ne devait y avoir qu'une seule raison (enfin deux combinées en une seule !) de regarder l'ensemble, ce serait pour la protagoniste interprétée par la comédienne d'Antoinette dans les Cévennes. Je la kiffe cette actrice, je la kiffe...


Mais la mise en scène soignée (mention spéciale aux scènes nocturnes et fluorescentes des assassinats qui ne sont pas sans rappeler un Winding Refn !) et l'utilisation du cadre breton (oui, parce que ça se déroule en Bretagne !) méritent aussi d'être mises en avant. Pour ce qui est de la Bretagne, ce n'est pas juste ici une belle toile de fond pour faire joli. Le récit ne pourrait pas avoir lieu ailleurs, car il exploite le particularisme de cette région à travers de nombreux éléments visuels et scénaristiques du film. Ah oui, il faut signaler, en outre, une mélodie électronique entêtante et mémorable de Charles Ludig qui n'aurait pas détonné dans un Argento ou dans un Carpenter.


Que dire de plus ? Ah oui, merde, les défauts... le côté "comédie romantique" n'est pas pleinement creusé. Dommage. Ce qui contribue un peu à ce que la fin paraisse un peu bâclée. Aussi, à propos de cette dernière, elle manque un poil de crédibilité.


Euh ouais, l'Île de Sein est un lieu soumis aux mandats d'arrêt français... ben... parce que c'est en France. Donc, île ou pas île, flics cons ou non, avec les médias, Internet et tout ça, elle se ferait griller très vite, dans une réalité un minimum vraisemblable, notre adorable serial killer. Mais je suis content qu'elle s'en sorte. Elle le mérite.


Il n'empêche, les qualités l'emportant largement, il serait regrettable de se priver de cette comédie bénéficiant d'une bonne conduite (OK, promis, là, je sors vraiment, kenavo !).

Plume231
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le 29 mars 2023

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