Pour l'américain aux quarante-cinq films, il est temps de faire un retour aux sources. Bye bye Paris, Rome, ou autre Barcelone, et bonjour San Francisco ! On quitte également les milieux mondains pour se rapprocher de Monsieur-tout-le-monde. Jasmine est belle, riche et a une vie merveilleuse. Mais lorsque son mari file en prison pour escroqueries, c'est toute son existence qui s'écroule. Décidant de retourner vivre chez sa sœur pour y voir plus clair, elle va s'apercevoir que le monde est loin d'être tout rose.

Très bien écrit, Blue Jasmine a un rapport au passé important. L'incapacité de surmonter des évènements difficiles est le plus grand défaut de Jasmine car elle n'accepte sa situation à aucun moment. Son existence étant construite sur des mensonges, cette femme arrive encore à vivre grâce à ses multiples tromperies et un monde factice qu'elle a elle-même façonné. Le superbe montage de Lepselter est en rapport direct avec le thème du passé, nous faisant comprendre la vie de Jasmine et ses artifices. Habituée au confort pendant trop longtemps, celle-ci a perdu le sens des réalités.

Allen continue d'explorer les caricatures (ici, la femme inactive et superficielle d'un riche homme d'affaire) mais d'un œil triste, mélancolique, en jouant avec la notion de vérité. Qu'est ce qui est vrai et qu'est ce qui ne l'est pas ? Le passé accompagné de ces flash-back sont là pour nous le dire tandis que le présent continue de nous emmener sur la voie de l'artifice. Jasmine est une femme arrogante et le public aurait cent raisons de la détester. Mais par une interprétation fabuleuse, la formidable Cate Blanchett arrive à lui donner de l'empathie et une complexité insoupçonnée. Tantôt folle, fière, triste, méchante, mythomane ou alcoolique, cette femme est profondément humaine.

Une caméra qui se ballade de pièce en pièce sans s'arrêter de tourner. Une musique jazzy qui accompagne le quotidien de gens souvent émouvants, parfois décadents. Un humour flirtant souvent avec le tragique pour laisser le réalisme prendre le dessus. Pas de doute possible, nous sommes dans un pur Allen. Et si ce dernier ne nous avait pas gâté ces dernières années, il montre aujourd'hui qu'il est loin d'être rouillé.
Hugo_Harnois_Kr
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le 7 févr. 2014

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Hugo Harnois

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