La seule chose que je puisse sereinement lui reconnaître, à Woody Allen, c'est le flair en matière d'interprètes. Cate Blanchett est bien évidemment resplendissante dans ce numéro de femme au bord de la crise de nerfs, une minute sur deux. Les brusques changements d'humeur de Jasmine lui vont comme un gant et lui donnent l'occasion de jouer sur toute la palette de son immense talent. Le reste de la distribution n'est pas à la ramasse, et c'est déjà un exploit en soi. Après, le côté embryonnaire de l'histoire donne un peu l'impression que c'était là l'unique intérêt de ce film. A la décharge du réalisateur, je dois avouer que j'ai toujours été complètement imperméable à son propos : cet inventaire des névroses modernes, urbaines et américaines me laisse un peu de marbre, et ce depuis des décennies. Je suis toujours sidérée qu'il continue à trouver le financement pour ses nouvelles moutures de ce que je perçois comme le même film... J'ai le sentiment d'avoir fait le tour depuis les années 80. Après, restent ses petites paraboles enlevées, avec quelques moments juste assez loufoques pour faire sourire (la déclaration enflammée du dentiste, ici...), mais jamais de quoi casser trois pattes à un canard. Je serais sévère en parlant d'une absence déprimante d'ambition, mais j'y reviens toujours un peu en matière de Woody... Un peu de jazz prise-de-chou, des actrices au top, enveloppées de lumières orangées, des marivaudages qu'on aimerait négliger, et pas franchement de ligne directrice, voilà une fois de plus le bilan. Pour ma part, je n'en retire jamais rien, et j'aime être un peu édifiée, quand même, quand je passe une heure trente à prêter attention à un auteur.