Les Références n'empêchent pas la personnalité

Je ne m'en étais pas rendu compte, mais cela faisait un bon moment que je n'avais pas vu de productions Blumhouse : il a donc fallu ce scénario a priori séduisant, adapté d'une nouvelle de Joe Hill (aka le fils de Stephen King) pour me ramener en salles, et je ne regrette pas du tout. Alors qu'il n'y avait a priori pas grand-chose à attendre de Scott Derrickson au début de sa carrière (j'avais même oublié le désastreux remake du « Jour où la Terre s'arrêta », celui-ci a finalement montré depuis qu'il était capable de bien faire, au point de me demander si « Black Phone » n'est pas son meilleur film.

Le réalisateur de « Doctor Strange » semble particulièrement à l'aise avec le sujet, construisant à la fois un récit fort, fluide, simple mais jamais simpliste, écrivant des personnages forts, intéressants, auxquels on s'attache tout de suite, évitant la plupart des clichés inhérents aux récits adolescents habituels, tout en soignant l'ambiance (visuelle notamment) et en n'occultant d'une Amérique profonde parfois désaxée, voire violente. La mise en place séduit ainsi autant que le « cœur » de l'œuvre, à savoir l'enlèvement de notre héros, plongé dans un cauchemar que l'on ne cherche pas à rendre inutilement réaliste, soignant autant les décors que les dialogues, assez peu nombreux mais suffisamment efficaces pour fonctionner.

Le récit se construit à partir de là en deux intrigues parallèles, relativement équilibrées et (plus ou moins) aussi intéressantes l'une que l'autre, cette idée du fameux téléphone, exploité intelligemment (malgré des dialogues un peu appuyés), où chaque victime du tueur aidera, à sa façon, Finney dans sa tentative d'évasion,

à l'image des motivations de l'antagoniste, interprété par un Ethan Hawke convaincant derrière son déguisement (en même temps, y a t-il de bonnes raisons pour enlever et assassiner des enfants ? Remarquez, des fois, en tant qu'enseignant...).

Le dénouement dans son ensemble va trop vite, d'autant que trop d'éléments en même temps (dont un surnaturel) amènent à identifier un assassin jusque-là insaisissable. Mais bon, cela reste de la bonne série B, bien menée, bien rythmée, interrogeant nos peurs, enfantines comme adultes, avec ce qu'il faut de référence à « papa » (« Ça », notamment) ou à d'autres grands noms du fantastique (on pense à « L'Échine du Diable ») : une des belles surprises de l'année 2022.