Si Black Panther n’est pas le premier super-héro noir de Marvel a être apparu en tête d’affiche sur le grand écran, la chasseur de vampire Blade l’ayant devancé (ainsi que d’autres super-héros noirs plus ou moins mineurs), en revanche le film est novateur sur de nombreux points. Le métrage propose ainsi pour la première fois, dans une super production, un casting majoritairement Noir. Alors qu’habituellement s’il y a un personnage Noir, il est noyé au milieu d’un casting Blanc, et ceci même si le héros est Noir (exemple : les films avec Will Smith), alors qu’ici il n’y a que deux personnages Blancs.


De plus le film met en scène de façon inédite un pays imaginaire africain. En effet, la plus grande partie de l’intrigue se déroule sur le continent africain, dans le petit royaume du Wakanda, dont les habitants ont cachés la grande richesse pour éviter la colonisation et de se faire piller leur principale ressource, le métal le plus solide au monde : le vibranium. Le film nous dépeint une nation Noire, libre, indépendante et riche. Le pays est montré comme moderne, ayant développé les technologies les plus avancées aux monde, et mélangé avec des aspects plus traditionnellement africains. Ce qui confère à l’œuvre une identité visuelle remarquable, qui est l’une des grandes réussite du film. La grande ville du pays a une esthétique à la fois futuriste et tribale, très colorée, entourée de superbes paysages naturels. On peut toutefois regretter qu’il soit peu crédible qu’un pays comme celui-ci puisse réussir à vivre caché et en autarcie depuis des siècles.


De même le film tord le coup au stéréotype de l’Afrique très misogyne, puisque le Wakanda a la particularité d’être une société non patriarcale ! En effet nous voyons dans le film de Ryan Coogler plus de femmes que dans les autres films Marvel. De plus ces femmes ne sont pas juste des mères ou des épouses, non, elles sont reine, cheffe de tribus, agent secret, scientifique… La garde du roi est même entièrement féminine, et quand T’challa (Chadwick Boseman) part en mission en Corée du Sud il n’emmène que des femmes. Tous ces personnages ont des personnalités propres, du caractère et n’hésitent pas s’opposer aux hommes, qu’ils soient leur mari ou leur roi. Si le dirigeant est un homme, les femmes tiennent aussi de hautes responsabilisées et sont respectées. Black Panther est donc autant un film de super-héro que de super-héroïnes. Dommage que cette bouffée d’air frais féministe ne soit gâchée par le fait que le pays soit régit par un système aussi archaïque qu’est la monarchie et icônise ainsi la personnalité royale, tout aussi humaniste que soit T’challa.


Il est tout aussi regrettable que le scénario soit aussi peu consistant et que l’histoire possède si peu d’enjeux, car trop prévisible. L’intrigue part en effet dans un sens avec le vol de vibranium par Ulysses Klaue (Andy Serkis), clôturant l’intrigue entamée par Avengers 2, puis dans un autre avec l’arrivée inopinée d’un cousin caché du roi qui vient réclamer le trône. Personnage qui gâche le propos politique du film. Dès le début du métrage, puis encore plusieurs fois par la suite, il est fait critique du racisme anti-noir et de l’oppression que vivent les Noirs à travers le monde. Malheureusement le film se montre très manichéen en opposant deux conceptions, une bien et une mauvaise, afin de répondre à la question centrale du film : le Wakanda doit-il aider ses frères et sœurs Noir-e-s et si oui comment ? Le personnage du cousin, Eric Killmonger (Michael B. Jordan), propose tout bonnement d’armer les Noirs et d’organiser une domination mondiale du Wakanda. Cette façon hollywoodienne de présenter systématiquement les révolutionnaires comme des dangereux terroristes tyranniques a de quoi faire grincer les dents. C’est d’ailleurs la même dualité présenté dans les films X-Men avec la représentation positive du professeur Xavier qui tente pacifiquement d’améliorer le sort des mutants, et la représentation négative de Magneto qui use de violence et d’autoritarisme (voir de suprémacisme), pour faire cesser l’oppression de ses semblables. C’est aussi la façon historique dont les milieux dominants soutiennent certaines formes de luttes tout en diabolisant d’autres (pour rester dans le thème de la libération noire, il y a l’exemple de Martin Luther King systématiquement glorifié, quand d’autres personnalités ou organisations sont pourchassées comme Malcom X ou le… Black Panther Party). Mais le film a au moins le mérite d’aborder des thématiques politiques complexes, ce qui le rend plus profond et plus intéressant que la plupart des autres films de super-héros, malgré qu’il règle ces questions de façon superficielle et caricaturale. Avec en plus des touches d’humour très maladroites qui gâchent certains moment dramatiques, ce qui est bien dommage.


Black Panther, par ses thématiques engagées et actuelles relève le niveau des films de super-héros actuels, mais pèche par son scénario peu innovant et sans surprises.

Angellore
7
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le 20 mars 2018

Critique lue 143 fois

Angellore

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