Les personnages auraient pu être des clichés. Un ado bizarre et dépressif. Un père qui, suite à la mort de sa femme, couche avec la prof de son fils. Un trentenaire qui n’assume pas sa toute nouvelle figure paternelle. Mais, pris les uns après les autres, ils se révèlent devant la caméra du norvégien avec grâce et gravité. D’une douceur infinie, le récit se contemple comme on plongerait notre regard dans l’âme de nos proches. Back Home est un film purement intimiste où les sentiments des uns se mêlent à la faiblesse des autres. Où la tendresse d’un père ne suffit pas à apaiser les douleurs d’un enfant.
Le montage aurait également pu être fâcheux. Chaque pièce est pourtant à sa place et nous livre des moments du quotidien fascinants. Non pas que ces derniers soient extraordinaires. Ils traduisent avec poésie et parfois même un peu d’humour des instants que l’on ne retient pas toujours, et qui sont pourtant essentiels. Construite en flash-back et flash-forward, la troisième œuvre de Trier brouille la chronologie des événements, afin de surligner avec justesse le deuil et son impossible notion du temps. Chaque geste est à scruter. Chaque mouvement de lèvres à étudier. Car les corps trahissent des réactions que les mots ne peuvent dévoiler.
Face à la perte d’une mère, les repères sont bouleversés, nos comportements, changés à jamais. Le cinéaste accentue cette notion dans sa narration par une présence féminine minimisée. Ces hommes, enfermés dans leurs propres vécus, ne savent comment se comporter avec leurs conquêtes. Accompagnés par la musique sombre et discrète du fidèle Ola Fløttum (déjà présent pour Oslo, 31 août), ces protagonistes errent et se cherchent dans un climat mélancolique, certes. Mais nécessaire pour se reconstruire.
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