Un film intéressant sur l'évolution de l'intelligence robotique mais dispersif et manquant d'enjeux

Dans la lignée de grands classiques tels que "Blade Runner" et "Terminator", l'auteur-réalisateur Gabe Ibáñez nous propose sa version de l'intelligence robotique devenant supérieure à celle des humains. Avec un scénario un peu dispersif et manquant d'enjeux, le film oscille entre quelques beaux moments de mise-en-scène et d'autres plus mous. Résultat intéressant!

Les récits sur l'intelligence artificielle surpassant celle des humains est loin d'être nouveau. Le thème aura décidément été abordé sous tous les angles dans le cinéma de science-fiction, au sein duquel il occupe d'ailleurs une place très importante avec, pour ne citer qu'eux, les classiques tels que "2001 L'Odyssée de l'Espace", "Blade Runner" ou encore "Terminator". Souvent matérialisée sous sa forme la plus simple et cinématographique (un ordinateur ou un robot-cyborg-automate), cette intelligence artificielle bascule très souvent vers une volonté d'anéantir l'espèce humaine ou de la manipuler d'une manière ou d'une autre. Et en effet, le thème est sujet à de nombreux débats au sein de notre société actuelle, alors que l'avancement technologique est encouragé par certains et que son impact futur en effraie d'autres.

De manière globale, la vision d'un monde futur gouverné par les machines fait toutefois moins parler d'elle ces dernières années étant donné que la mutation technologique que subit le monde devient progressivement le quotidien de chacun. Ce qui n'empêche évidemment pas d'aborder le sujet sous d'autres aspects, comme l'a par exemple si bien fait Spike Jonze dans "Her" en amenant le concept d'un programme informatique au service des êtres humains, et en abordant les questions actuelles des réseaux sociaux et de l'aspect virtuel que prennent certaines relations.

Mais qu'en est-il de "Automata" de Gabe Ibáñez? Beaucoup moins ancré dans le présent, le film nous donne une vision d'un futur dévasté par des phénomènes naturels ayant détruit la plupart des ressources terrestres, et nous présente d'emblée qu'un groupe de survivants a développé la construction d'automates pour leur construire un dispositif de protection contre les radiations et autres dangers. Ces robots sont régulés par 2 protocoles qui leur interdit de faire du mal aux êtres humains. Et c'est dans cet univers post-apocalyptique que nous suivons Jacq Vaucan (Antonio Banderas), un contrôleur des assurances marié à une femme enceinte et se retrouvant confronté à des cas d'automates modifiés et capables de se reconstruire d'eux-mêmes, comme s'ils avaient acquis une certaine 'conscience'.

Si le démarrage du film tend plus vers le thriller, avec un enquêteur à la recherche de réponses aux phénomènes qu'il constate, c'est à partir du milieu que "Automata" commence à s'égarer, n'ayant visiblement plus rien à nous révéler sur ces mystères, et qu'il se rabat sur son côté "science-fiction" en espérant apporter une réflexion profonde sur l'humanité, sur la technologie et sur l'évolution de chacun des deux partis. Et c'est à ce niveau-là que le film pose problème: le genre et l'objectif du film ne sont pas clairement définis. Bien des critiques déclarent que le début du film est bon et se perd à la fin, tandis que d'autres disent au contraire que la fin est géniale mais le début pauvre. En réalité, les deux parties sont plus ou moins bien maîtrisées, mais le problème est qu'elles ne collent pas ensemble. La première moitié du film, rythmée, avec des changements de lieux divers, fonctionne comme un thriller, tandis que la second moitié, à partir du moment où Jacq quitte la ville pour se retrouver dans le désert avec trois automates, s'avère être un tout autre récit, plus lent et tourné vers la réflexion...

D'où l'absence évidente d'enjeux dans "Automata"! Non seulement le côté polar s'épuise dès la moitié du film, mais en plus le réalisateur Gabe Ibáñez choisit de présenter ses robots comme des "gentils" visiblement en harmonie avec la nature, désireux de la connaître d'avantage et fuyant la violence destructrice des hommes qui les mènera à leur auto-destruction. Si ce ne sont les brèves séquences de chasse à travers le désert et une scène de fusillade finale sans véritable fondement, le film manque cruellement de tension et d'enjeux pour faire avancer son récit et tenir le spectateur jusqu'au climax. A ce niveau-là, nous pouvons aussi questionner l'intention du réalisateur: que voulait-il au final nous dire à travers ce film, à travers les sages mais vagues paroles des automates? D'une part éveiller notre questionnement envers ces automates qui pourraient bien au final devenir... nous, ou du moins le prochain stade de notre évolution. Mais encore?

Face à une évidente mollesse au niveau d'un scénario trop dispersif, Ibáñez parvient toutefois à proposer quelques magnifiques séquences, tant dans la première que dans la seconde partie du film. La grande réussite de "Automata" tient certainement à la rencontre et la relation se formant entre Jacq et Cleo, une automate qui va lui venir en aide. C'est à travers son regard inerte que toute la complexité de la relation homme-technologie se dépeint, un peu à l'image de HAL 9000 dans "2001 L'Odyssée de l'Espace". Car les pensées de la machine demeurant impénétrables, il ne reste à l'être humain que la possibilité de tenter de cerner une expression, un sentiment dans ce visage pourtant inexpressif, un travail auquel le spectateur se livre également, prêt à croire que Cleo est en train de sourire alors que, physiquement, son visage demeure inchangé!

En dépit de ses problèmes scénaristiques, "Automata" demeure intéressant grâce à certaines scènes, certains échanges entre personnages et certaines idées qu'il aborde. Toutefois, le film manque de la conviction nécessaire que pour nous fournir une fin valable et sensée. Visuellement réussi, le récit est également tiré par le haut grâce à la performance d'Antonio Banderas (on ne peut hélas pas en dire autant pour tout le casting du film) et, avant tout, par ses robots bien pesants, lents, palpables et crédibles.
Ciné-Look
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le 2 nov. 2014

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