Le vent se lève... Il faut tenter de suivre

Récipiendaire de huit oscars dont ceux du meilleur film, du meilleur réalisateur, de la meilleure actrice et de la meilleure actrice dans un second rôle, plus gros succès mondial de l'histoire au box office compte tenu de l'inflation, Autant en emporte le vent est considéré comme un monument du cinéma américain et international. Une réputation justifiée, tant par sa durée proprement monumentale (3 h 58, tout de même !), sa débauche de moyens pour les reconstitutions d'Atlanta pendant la guerre de Sécession et après, ses costumes chatoyants, sa musique entêtante et son utilisation parfaite du Technicolor. L'autre chef-d'œuvre de Victor Fleming, réalisé dans la foulée du non moins incontournable Magicien d'Oz, est sans conteste un monument d'Hollywood, un film essentiel que des générations de spectateurs ont vu et revu, et que tout cinéphile contemporain se doit d'avoir vu au moins une fois dans sa vie.


C'est mon cas depuis hier, mais que ce fut long... Même divisés en deux tranches, ces quatre heures de pellicule ne sont pas passées sans mal. La faute en incombe presque uniquement au personnage de Scarlett O'Hara - à mon goût très médiocrement interprété par Vivien Leigh - qu'on ne quitte quasiment pas des yeux pendant toute la durée du film. Fille aînée d'une riche famille de propriétaires terriens en Géorgie, Scarlett a 16 ans lorsque débute l'histoire, en 1861. Alors que la guerre entre les états du Sud et ceux du Nord est sur le point d'éclater, elle assiste avec dégoût à l'annonce du mariage d'Ashley Wilkes, pour qui elle nourrit un béguin irraisonné, avec la propre cousine de celui-ci, la douce mais fade Melanie. Pendant les douze années de la vie de Scarlett narrés dans le film, on assiste à ses multiples et vaines tentatives pour détourner l'honorable Ashley de la voie dans laquelle il s'est engagé, celle du mariage et de la paternité. Archétype de la riche héritière égoïste et intransigeante, Scarlett passera ces douze années de vie à courir le mauvais lièvre et à refuser de voir l'amour dans les yeux cyniques mais sincères du séduisant Rhett Butler, incarné par un Clark Gable pas encore ravagé par l'alcool. Bref, Gone With the Wind est le récit, triste jusqu'à l'écœurement, des mauvais choix de Scarlett, entre rejet, déni et compromissions sordides. Son attitude, tout juste risible au début, devient vite pénible, puis affligeante, et enfin insupportable, le personnage de Scarlett ne suscitant aucune empathie.


L'autre point particulièrement dérangeant de cette histoire au long cours, c'est l'apologie faite de la haute société sudiste, de son penchant avoué pour les mariages au sein d'une même famille, et bien sûr de ses mœurs esclavagistes présentés comme parfaitement légitimes. En opposition à cette société décrite comme raffinée, les Yankees incarnent un monde nouveau dénué d'honneur, et un capitalisme dévorant et mortifère. S'il faut admettre que la réalité historique se situe quelque part à mi-chemin entre la vision livrée dans le film (ainsi que dans le roman éponyme de Margaret Mitchell dont il est adapté) et la tradition hagiographique des gentils Nordistes libérant les esclaves par pure grandeur d'âme, le spectacle qu'offre le film n'en reste pas moins navrant de partialité et de mauvaise foi.


Mais malgré ces deux défauts majeurs que j'y ai vu, Autant en emporte le vent est bel et bien un film essentiel, grandiose et épique par moments, admirablement filmé, remarquablement interprété par certains acteurs dont Gable, mais aussi Olivia de Havilland et l'excellente Hattie McDaniel dans son inoubliable rôle de Mamma, et finalement captivant de bout en bout.

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le 19 juil. 2017

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The Maz

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