Avec As Bestas, Sorogoyen revisite l'éternel conflit du pequenaud débile VS le citadin idéaliste. Après la Géorgie dans Délivrance et le fin fond de l'angleterre dans les Chiens de Pailles, c'est cette fois çi dans un petit village de Galice que va se jouer cette guerre de fracture entre deux mondes pour qui la cohabitation semble impossible.
Ce qui est interessant dans As Bestas (contrairement au deux films sus-mentionné), c'est que les thèmes sont on ne peut plus actuels. A travers cette bataille entre deux voisins, une famille de pur rednecks espagnols, violents alcooliques et racistes et deux français bobo qui ont effectué leur "retour à la terre", le film parle d'identité, d'écologie, d'isolement, de fracture sociale, de solitude, de ruralité. Dans les médias, on oppose sans cesse et toujours dans la caricature, ces ruraux qui votent FN contre ces "bobos citadins" qui vont acheter leur légumes bios en trotinette électriques. Que la caricature soit justifié ou pas, il y a effectivement une fracture entre deux mondes, et il semble qu'il y ait le même problème en Espagne.
Mais au delà du thème, c'est surtout par les acteurs que As Bestas brille. Ménochet est toujours aussi charismatique, lourd, solide mais désemparé. Même chose avec Marina Fois, avec laquelle on a du mal à se dire qu'elle a commencé en faisant Sophie Pétoncule. Je ne connaissais pas les acteurs espagnols, mais ce Luis Zahera m'a bluffé. Il dégage une sorte de magnétisme à la Richard Boringer, avec son regard comme des poignards et sa voix errayé.
Et puis il y a cette tension, qui s'instaure de manière insidieuse, d'abord par des regards et des silences. Puis la menace devient plus palpable, plus inquiétante. Jusqu'à finir dans une atmosphère quasi-horrifique qui vous laissera cloué au siège. Le seul gros défaut du film s'est sa difficulté à conclure.
Après la mort de Denis Ménochet, la tension retombe. Et ce qui faisait le sel du film disparait en même temps. Nous voici alors obligé d'assister à des engeulades enterminables en Marina Fois et sa fille alors que tout le monde à deviné comment le film allait se terminer. Mais bon, la film a mis la barre très haut pendant 1h30. Il fallait bien redécendre...