Un spectaculaire domptage de chevaux par des aloitadores.Dès sa première scène,Sorogoyen vient cristalliser tout ce qui composera les 2h17 qui vont suivre : fusion de l'Homme et de l'animal,contexte rural traditionnel et âpreté visuelle. Le tout formera une véritable claque sur de nombreux plans.
C'est d'abord un vrai thriller rural que nous propose le cinéaste espagnol.Dans cette affaire de voisinage dont la violence connaitra une escalade lente mais inéluctable,ce dernier étudie l'impossibilité des hommes à connaître conciliations et règlement des litiges par le dialogue à l'heure où les enjeux,les intérêts de chacun divergent constamment..La tension qu'il y inculte ne s'interrompra jamais et connaîtra de régulières métamorphoses,analogiquement à son traitement de la violence.Son "As Bestas" échappe ainsi par-là à l'écueil d'un manichéisme qui aurait été malvenu.Dans la thématique même et dans son approche,Sorogoyen n'hésite pas à prendre de nombreuses références qu"il arrive à moderniser et à s'approprier que ce soit dans la structure de son film (Les chiens de paille) ou dans le travail de certaines scènes (le viol de Délivrance dans lequel l'Homme devient au sens propre un animal). On remarquera en outre cette volonté d'offrir un western contemporain,autre référence en l'espèce.C'est sur ce point-là que l'on peut insister sur le remarquable travail des sons et des sensations liés au cadre idyllique qu'offre la Galice rurale.
Mais le film prend une toute autre forme lorsqu'il couple ce traitement des rapports humains et de la violence inéluctable qui en découle à une analyse de son Espagne contemporaine : lutte des classes,paradigme entre protection de l'environnement et traditions rurales,exode rural,discriminations.Sur certains points cités,vous remarquerez que le film se veut plus universel qu'un simple propos propre à l'Espagne traditionnelle.Le tout gagne en efficacité lorsque le cinéaste n'hésite pas,à l'appui d'une remarquable direction d'acteurs,à appuyer un ultra-réalisme presque effrayant,à la gestion du cadre toujours juste.