Librement inspiré de l"'affaire Mehdi Meklat ", ce nouveau long métrage de Laurent Cantet se focalise uniquement sur les deux jours suivant l'éclatement de l''affaire, ce qui est forcément difficile, comment faire tenir sur une période aussi ramassé, le récit d'une glorification et celui d'une chute ?
La réponse est simple, point de glorification, que de la chute, une chute brutale, continue et que le réalisateur semble réprouver, filmant son héros avec beaucoup de compassion.
Pourtant, si l'on l'écoute, Laurent Cantet l'affirme : "Même si le film regarde son personnage avec une attention parfois bienveillante, je ne devais surtout pas chercher à le protéger en gommant tout ce qu’il y a d’irrecevable chez lui. Il fallait qu’on oscille continuellement entre le rejet et l’empathie (...) Un salaud qui écrit des saloperies ne m’aurait pas intéressé. Par contre, qu’un jeune homme avec qui on pourrait sympathiser soit capable d’écrire de tels messages, ça interroge.”
De louables intentions, mais difficile pourtant, tant le héros semble constamment dépassé par la tournure des événements, d'éprouver un réel sentiment de rejet à son égard.
Sans doute, sommes nous, nous mêmes, biaisés, tant il nous parait ridicule ce genre de polémique, l'art n'ayant aucune vocation à la bienveillance, et tant le deuxième degré nous parait assez évident dans les tweets du personnage (souvent drôle par ailleurs).
Alors difficile d'éprouver du rejet pour le personnage, ce qui rend forcément le film un petit peu long et par moment assez lourd. Un exemple frappant : Lorsque le personnage veut se servir d'une boisson gazeuse (non nous ne céderons à aucune pulsion humoristique) et que le soda se retrouve au sol... l'on s'attendait alors presque à voir la pluie tomber sur Karim.
Quelle est l'utilité de cette scène ? Aucune si ce n'est nous amener à penser que ce pauvre gars a vraiment eu une sale journée et quand rien ne va, rien ne va... Sans déconner, si quelqu'un à retrouver la subtilité, merci à lui de la rapporter à Laurent Cantet, il semble l'avoir perdu depuis un bout de temps.
Et nous revenons toujours au même problème, en enfermant son récit dans un cadre temporel si restreint, et avec une mise en scène aussi peu inspiré, le réalisateur oblige les personnages à exprimer immédiatement leur opinions, forcement très tranchés, et forcément à les expliquer longuement; pourquoi devrions nous montrer par l'image au cinema quand on peut faire répéter les choses à chaque personnage pendant 40 minutes...
Et c'est la que le bat blesse, le réalisateur ne filme déjà plus le réel mais une abstraction, et clairement la mise en scène n'est pas du tout adapté et rend le visionnage un peu pénible, le spectateur n'étant ni impliqué émotionnellement ni stimulé artistiquement, il ne lui reste plus grand chose à se mettre sous la dent.
Le film aborde nombre sujets, tel que l'exemplarité éventuellement demande aux personnes issues des minorités ayant réussi, enfonce de nombreuses portes ouvertes (réseaux sociaux... merci pour l'info) mais ne traite rien, collant surtout à son héros, constamment sommé de répondre à cette question : Pourquoi as tu écrit cela ? Nous ne le serons pas, personne ne le saura vraiment, et tant mieux, un peu d'ambiguïté n'est pas pour nous déplaire même si nous aurions aimé que le réalisateur prenne le temps de nous proposer quelques explications, sans nécessairement opter pour l'une d'entre elles d'ailleurs.