Armageddon Time est une autobiographie à coeur ouvert du réalisateur James Gray, sur la dureté de l’enfance à travers une recherche d’identité qui le mènera dans ce qui semble être sa première liberté.

Après les étendus sauvages de The Lost City of Z ou encore la beauté spatiale d’Ad Astra, James Gray revient avec une œuvre extrêmement personnelle sur son enfance dans le Queens des années 80.

Vers l’infini…

C’est assez naturellement que le film nous fait participer à l’aventure du petit Paul, enfant dont l’imaginaire fait à la fois sa dissemblance et son authenticité.

D’une belle amitié entre un afro-américain et un juif, aux relations compliquées de la sphère familiale, le réalisateur raconte à son public une aventure pleine de sensibilité, sous les traits de revers qui préfèrent répondre aux souvenirs du metteur en scène plutôt qu’à un rythme prédéfini.

Nous avons déjà eu ce genre de candeur cette année avec l’excellent Belfast de Kenneth Branagh. A croire qu’avec le temps, les cinéastes ont envie de se confier sur l’origine de leur génie. Mais à vouloir trop se livrer, le film sonne un peu trop personnel et le spectateur a du mal à se fondre réellement dans le tableau. Ce n’est pas le cas par contre pour une époque parfaitement représentée, véritable mine de souvenirs où la mort du disco laisse place au hip-hop des Sugarhill Gang.

Figure de style sur la perte d’innocence, Armageddon Time nous porte jusqu’aux limites des inégalités sociales et de la dureté des corrections qu’un parent peut affliger à un enfant qui a pour seul réconfort les bras d’un grand-père et meilleur ami chevaleresque, brillamment construit par Sir Anthony Hopkins.

A travers Paul, nos sentiments se font avoir par les rêves d’un gamin insouciant et trop sûr de lui, il veut à la fois résister à ses parents et trouver un quelconque point d’accroche pour toutes les questions qu’il trouve sur son passage, mais la tentation d’une autonomie à part entière est trop grande pour le convaincre de suivre un chemin déjà construit.

Contre toutes les scènes poignantes, la douceur que propage Darius Khondji avec sa photographie nous installe sur un petit nuage en sucre, prêt à écouter tous les doutes que le réalisateur a dû traverser avant de s’affirmer dans un univers qu’il aime découvrir et partager dans chacun de ses films.

…et au delà.

En somme, la couverture est un délice avec un humour subtil dont le cinéma sait s’éprendre depuis quelques années, mais nous sommes de trop dans cette famille pleine de force et de maladresse. Anne Hathaway a beau toujours être parfaite, le personnage de la mère est un peu trop linéaire et pondérée, quand du côté de Jeremy Strong qui offre au film une de ses plus belles scènes, sa poigne et sa décadence nous rappellent que l’acteur de Succession a du beau monde sous le capot.

Pour autant, on arrive à s’émouvoir avec le personnage principal (devenu un véritable petit mensch), à le comprendre et à notre tour, nous redevenons tous des enfants d’une dizaine d’années à la conquête du monde, d’un monde d’artistes, loin de tout apocalypse.

murron
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le 3 juil. 2022

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