Quand l’annonce d’Annette en tant que film d’ouverture du 74ème festival de Cannes (mon premier en tant qu’accrédité) fut officialisée, il fut dur pour moi de contenir mon impatience.


Imaginez-vous une comédie musicale réalisée par un des cinéastes français les plus intéressants, Dur de faire un mauvais film n’est-ce pas ? De plus la présence du somptueux Adam Driver et de Simon Helberg (l’hilarant Howard de The Big Bang Theory) faisait oublier Marion Cotillard en tant qu’actrice principale.


So, may we start ?
Après un « message de prévention » assez cringe et un GIF dégueulasse, le métrage débute par une séquence où le réalisateur endosse le rôle de producteur musical et donne le « la » à un groupe de musique composé des Sparks (scénaristes d’Annette) et les figures de proue de l’œuvre. Un générique auquel on adhère ou non mais qui a au moins le mérite d’être intéressant dans le parallèle qu’il construit entre les acteurs et leurs rôles, avant de nous plonger dans un récit complètement foutraque. Ici, cette pseudo déification du metteur en scène (primé lors de la cérémonie de clôture) est assez agaçant mais ce n’est rien comparé à la suite du film.


They’re out of this world
Parlons désormais de ce qui caractérise la comédie musicale dont tout le monde parle en ce moment, ces deux personnages (adultes) principaux : Henry et Ann.


Henry est un humoriste provocateur qui n’en manque pas une pour choquer son auditoire et le railler. Foule qui, jusqu’au premier tiers du récit, acclame l’artiste. Un parallèle est possible ici entre le rôle principal masculin joué à la perfection par Adam Driver et l’œuvre de Carax : tout deux sont assez sulfureux et ont le gout de représenter des évènements pouvant être jugés comme incongrus au sein de leurs scènes.
Provocateur ? Oui ! Drôle ? Non !


Je ne sais pas ce qu’a pris le public de la première représentation de Ape of God mais ça devait être de la bonne. Impossible de rire face à ces scènes trop longues, répétitives et comportant des gags vraiment mal venus. Voir Driver s’étrangler avec le micro, c’est sympa une fois mais plusieurs…
De plus, la vanne sur les attentats dans les salles de spectacles de la part d’un réalisateur français est tout juste honteux vis-à-vis des tristes évènements de 13 novembre 2015. Cependant la deuxième représentation du show fonctionne à 80% bien, un public comme nous en rejet de ce qui est proposé et une atmosphère beaucoup plus sombre suite au « sketch de trop » mais la répétition excessive de « sick » nous sort du récit.


De la finesse dans cette daube ? Vous en demandez trop.


Caricature ennuyante de la femme parfaite, la cantatrice Ann est sans doute le pire personnage du film. Une sacro-sainte de plus dans l’histoire pompeuse de la romance au grand écran.
Elle est pâle, symbole de pureté ; meurt tous les soirs pour « sauver » son public. et finit par donner naissance à l’enfant prodige.


Son esprit jouera même des tours pour mettre son McHenry en péril à la mort de cette dernière. Marion Cotillard qui représente la trinité à elle seule : ça fait beaucoup là non ?


We love each other so much
Pour évoquer le couple McHenry/Desfranoux rapidement, il est tout simplement impossible de croire en une relation sérieuse entre ces deux personnages. On ne sait RIEN d’eux ! Ah si, ils s’aiment énormément et c’est dur à expliquer…


tout comme leur manie de chanter durant leurs actes sexuels. Oui oui ça n’a rien à faire dans un film.


Même leur enfant est mal géré,


si Annette est représentée comme une poupée (hideuse soit disant en passant) c’est parce qu’elle est vue par ses parents comme un objet à haut potentiel médiatique, ce qui n’est jamais expliqué ni montré subtilement avant le dénouement final.


Let’s Waltz in the storm!
Si le Joker de Burton valsait avec le diable au clair de lune, cette branlette intellectuelle axe son marketing sur une valse au cœur d’un ouragan de folie. La réalité est toute autre,


trois misérables vagues durant lesquelles la cantatrice vedette est envoyée dans le décor.


Pour conclure, si vous voulez regarder une œuvre de Carax, dirigez-vous plutôt vers un de ses anciens films plutôt que sur la nouveauté qui vous choquera sur l’homme plus qu’elle ne vous galvanisera. Effectivement, si le personnage de Driver colle parfaitement à celui de Carax, c’est très dérangeant.


Une perspective de bon film qui tombe à l'eau.

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le 27 juil. 2021

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Captain Walker

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