Alien vs Predator était nul. Tout simplement. Même votre petite soeur vous le dira.


Lui trouver des qualités reviendrait à en chercher aussi au Batman and Robin de Joel Schumacher, au Terminator Genisys d'Alan Taylor ou même à Camping 3 de Fabien Onteniente. Ce serait comme chercher une quelconque trace d'intégrité dans les propos d'Emmanuel Macron ou de bon sens dans l'esprit malade de Donald Trump. Mais le film d'Anderson a marché et la cruelle loi de la rentabilité prime toujours sur le souci qualitatif à Hollywood. A savoir que les producteurs avaient certainement bien conscience qu'ils avaient vendu de la merde mais que tant que les spectateurs payaient pour en bouffer, il n'y avait aucune raison de ne pas en chier encore un peu plus. Du coup, c'est sans grande surprise que fut rapidement mis en chantier un projet de suite AvP. Parti filmer la star de la savate Jason Statham dans un très mauvais remake de La Course à la mort de l'an 2000, Paul Anderson cédait ici sa place aux frères Strause. Ayant débuté à Hollywood en tant qu'infographistes, les deux frangins se sont ensuite formés à la réalisation par correspondance et ont eu rapidement l'ambition de réaliser leurs propres long-métrages de SF. Mystérieusement (bagout, piston ou promotion canapé ?), les deux gonzes se placèrent alors en tête de liste pour succéder à Anderson à la barre de la suite d'AvP. A l'époque, et ce malgré la déconvenue du premier film, personne n'imaginait encore ce que pouvaient nous réserver les deux frangins. En effet, il était théoriquement impossible que ceux-ci fassent pire que leur prédécesseur, et ce d'autant plus que les Strause déclaraient alors à qui voulait l'entendre que leur film renouerait avec l'essence de l'Aliens de Cameron, soit plus de bidasses, plus de xenomorphes, plus de violence. Ils mettaient aussi en évidence leur audace, preuve en était cette scène clairement mise en avant lors de la promotion du film, où l'on voyait un enfant victime d'un chestburster.


Aussi prometteurs que couillus les frangins Strause ? Pas tant que ça. Car la sortie du film eut tôt fait de révéler l'impensable : AvP Requiem était nul. Vraiment. Excessivement nul. Tellement nul que certains fans ont tournés de l'oeil dès les dix premières minutes de film en salles quand d'autres se sont mis à pleurer littéralement des larmes de sang. Certains tombèrent instantanément en profonde dépression nerveuse et durent être hospitalisés quand d'autres s'immolèrent à l'entrée des cinémas en prenant une pause christique similaire à celle de Ripley à la fin d'Alien 3. Les plus atteints en vinrent même à vouer un culte à Paul W.S. Anderson et à son incomparable sens de l'esthétique, lui consacrant des rétrospectives cinéphiles et des soirées marathons dédiées à ses plus grands films. Plusieurs meurtres mystérieux frappèrent les dirigeants et les exécutifs de la Fox, la rumeur parlant alors d'un contrat commandité par Ridley Scott himself, afin d'avoir le champ libre pour son futur Prometheus. Bien décidés à dégueulasser un peu plus le cinéma de SF, les frangins Strause ont ensuite réussi à commettre un second film, le désastreux Skyline. Ce dernier navet ajouté au souvenir douloureux d'AvP Requiem suffit à l'époque pour qu'un tribunal populaire de fans furax traquent pendant plusieurs semaines les frères Strause à travers toute la Californie et les capturent finalement lors d'une battue dans les bois environnant la ville de Burbank. Au terme d'un procès public, présidé par Dan O'Bannon, les frères Strause furent reconnus coupables de déjections cinématographiques et condamnés à l'exil carcéral à perpétuité. A ce jour, personne ne sait où les deux frangins purgent leur peine.


Il existe néanmoins encore des copies abominables de leur premier crime, en version cinéma d'origine. Aliens vs Predator : Requiem se trouve en effet encore facilement sur le dark net, via quelques plate-formes obscures de streaming illégales. C'est alors une expérience sacrément éprouvante que de tenter de revisionner le film sans s'arracher les yeux ou se faire sauter le caisson. Comment est-il possible qu'un jour des producteurs en costard cravate, a priori des êtres humains dotés de raison et d'un minimum de bon goût, aient pu valider le script puis le tournage et enfin la post-production de cette chose ? Comment les frères Strause ont-ils fait pour bouger autant leur caméra sans vomir sur leurs acteurs ? Quel genre de charcutier de la pellicule a bien pu s'acharner de la sorte sur le montage ? Et surtout, surtout, qui est Shane Salerno, le scénariste du film : D'où vient-il ? Que veut-il ? Quelles sont ses qualifications, ses aspirations ? Existe-t-il seulement ?


Aliens vs Predator : Requiem est un cas d'école. Il est de ces rares films dont on sent qu'il pue méchamment avant même d'avoir ouvert le boitier DVD. Si vous osez cliquer sur son titre sur un site de streaming, Google lui-même vous demandera si vous êtes bien sûr de vouloir faire ça. Si vous cliquez sur oui, vous découvrirez une succession aberrante de personnages caricaturaux, de très mauvais acteurs, une intrigue indigente, une photographie dégueulasse, des cadrages bâclés, un montage massacré. Les frères Strause n'ont rien, absolument rien de réalisateurs, ils ne comprennent rien aux notions de lisibilité de l'action, de conventions esthétiques et même de narration séquentielle. Ainsi, si Paul Anderson faisait tout ce qu'il ne fallait pas faire, à savoir filmer ses monstres sous toutes les coutures et face caméra, les frangins Strause feront l'inverse, de manière à nous faire croire qu'ils respecteront la règle d'or de Spielberg, Scott et Carpenter, à savoir miser le plus possible sur la suggestion. Mais les deux frangins le feront avec la subtilité d'un réalisateur de DTV de chez Asylum : leur mise en scène abuse des entrées dans le champ mal amenées (le marine devant la voiture) et de jump scares foireux (la mort de Carrie dans la cuisine), la photographie est parfois si sombre dans les scènes de nuit qu'on ne voit plus rien, ni monstres ni humains, les cadrages sont si mauvais qu'on ne comprend parfois plus rien à ce qui se passe à l'écran (voir la scène de la piscine). C'est à tel point lamentable que le visionnage du film en devient franchement pénible. Et ce n'est certainement pas le scénario qui rattrapera le tout tant il aligne une belle collection de clichés (le petit bled isolé, l'ancien taulard en réinsertion, l'amoureux transi, les petites brutes, la femme forte proto-Ripley, le shérif débile, les gardes nationaux rapidement massacrés) et transforme ce cross-over en vulgaire slasher, tout juste digne des pires bisseries des 80's.


Que faire alors ? En cas de visionnage accidentel et si les premiers symptômes se font ressentir (nervosité, nausées, vomissement, fièvre délirante, idées suicidaires), ne paniquez pas. Arrêtez tout de suite le film. Si vous l'avez acheté en DVD ou Blu-ray, sortez la galette du lecteur et jetez-la immédiatement au feu avec son boitier (Surtout pas la poubelle ! N'importe qui pourrait les récupérer, pensez aux autres !). Lavez-vous soigneusement les mains après, voire prenez carrément une douche (privilégiez alors la Bétadine au savon classique). N'appelez surtout pas les urgences en ce moment, ils sont un peu débordés. Obligez-vous plutôt à boire un petit whisky (voire un grand), l'ivresse peut aider à oublier. Si vous repensez encore à des images du film, revisionnez Alien et Aliens, tous les jours pendant 12 jours. Si les symptômes persistent après ça, ajoutez-y Alien 3 et Prometheus, pendant six jours supplémentaires. N'essayez pas Alien Resurrection, le risque de rechute serait alors trop important. Le traitement peut être long mais il est en général efficace. Voyez ça a marché pour moi, j'ai presque oublié cette aberration.


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le 1 avr. 2020

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Buddy_Noone

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