Cette critique contient plein de spoil, vous êtes prévenus dans le TITRE là

Faut-il juger un film selon ce qu'on a ressenti en le visionnant, ou selon le souvenir qu'il nous laisse après l'avoir vu ?
Question épineuse, puisque selon la réponse qu'on pourra lui donner, mon opus préféré de la saga Alien sera le 2 ou le 3. D'un côté, on a l'opus de Cameron que j'ai trouvé complètement prenant, voire jouissif; de l'autre celui de Fincher qui est plus bancal et fragile, mais qui s'appuie sur un propos et des images bien plus marquants et percutants. (Quant à l'opus de Scott, je l'ai trouvé parfaitement bien foutu d'un point de vue technique, mais terriblement ennuyeux. Désolé.)


Alien 3 donc, même s'il part sur une base apparemment quasi-suicidaire (ALLEZ ON REBUTE TOUT LE MONDE SAUF RIPLEY !! :D), se trouve être très intelligemment pensé. Refaire un huis clos, mais cette fois dans la prison glauque d'une planète lointaine, c'est une très bonne façon de constituer l'ambiance horrifique que Scott semblait vouloir instaurer dans son "Alien".
Et puis ça amène à toutes sortes de tensions qui vont permettre au film d'être plus sombre et réaliste : d'abord le malaise de Ripley qui se trouve être la seule femme au milieu d'anciens prisonniers au passé peu glorieux, ensuite le fait que malgré la taille de la prison (on est quand même pas dans un vaisseau !) les faits et gestes de chacun soient vus et sus, enfin le fait que les ressources pour éliminer l'alien vont se retrouver bien amoindries.


Tout cela va amener à des réflexions qu'on avait pas eu jusque là dans la saga; sur l'égalité hommes-femmes par exemple, égalité que Ripley va gagner progressivement tout le long du métrage, en étant d'abord présentée comme le personnage faible et gênant, pour finir par devenir leader, s'épanouissant dans le personnage de femme forte qu'elle occupe généralement dans la saga. (D'ailleurs l'évolution de Ripley dans les volets 2 et 3 est à mon sens très pertinente. Bah oui, quand tu passes 57 ans à flotter dans l'espace, t'as peut-être bien envie de t'envoyer en l'air et/ou de construire une relation mère-fille avec une petite fille marquée par le drame trouvée dans un conduit d'aération, nan ?)
Ensuite, une bonne petite tirade contre le gouvernement et ses objectifs pervers (qui fait sourire quand on se dit que Fight Club sortira 7 ans plus tard), gouvernement qui d'ailleurs se retrouve finalement bien plus placé comme "méchant" du film que l'alien. En effet, ce dernier étant un danger incontrôlable, il n'est pas présenté comme le Mal, mais comme l'objet potentiel du mal. C'est une vision très intéressante des choses, amenant une subtilité jamais vue dans un film Alien jusqu'alors.
Enfin, je ne parlerais pas des symboles religieux qui pour moi ne signifient pas grand chose dans ce film, mais on retrouve quand même un amusant parallèle entre l'arrivée de l'alien et une potentielle fin du monde, et à la fin on a un symbole fort avec Ripley qui se sacrifie pour empêcher l'humanité de se faire décimer. Ce genre de virage fait prendre à la saga un sens fort, on sent tout à coup que les enjeux ont grimpé, que si pour les prisonniers le monde que l'on voit est le seul (allégorie de la caverne je t'ai déjà dit d'arrêter de m'emmerder quand je regarde un film, c'est chiant merde !!), pour Ripley il existe toujours une vraie Terre avec des gens qui risquent de se faire coloniser par ces bêbêtes pas très jolies. J'ai rarement vu une aussi bonne utilisation du hors-champ.


Cela dit, Alien 3 n'est pas exempt de défauts, loiiiiin de là ! Certaines incohérences ne se contentent pas d'être incohérentes, mais sont aussi très agaçantes.
Le fou qui demande à se faire libérer pour aller ouvrir la porte où ils ont enfermé l'alien, pourquoi ? Il est fou, certes, mais est-ce suffisant pour justifier cet acte totalement débile ? N'est-ce pas juste un Deus Ex Machina ayant pour but de relancer l'action du film ?
Ripley qui abrite en son ventre une Reine ou je sais pas quoi, c'est bien beau, mais comment ? Vous voulez pas faire au moins semblant de nous expliquer ? Certes c'est une façon de montrer le lien fusionnel que commencent à acquérir Ripley et l'alien depuis le premier film, et c'est une possibilité de faire naître une masse de théories toutes plus folles les unes que les autres sur l'univers d'Alien, mais ça reste super mal amené dans le film.


Les autres problèmes du film tiennent pour la plupart du rythme, très inégal, avec certaines scènes largement dispensables. Même si la version de 2h30 est la plus intéressante puisqu'elle dispose de scènes-clé de l'intrigue; cela reste trop long, ce qui est dommage puisque l'on sent tout de suite quand une scène est véritablement utile, et ces scènes utiles sont généralement très réussies.
Je pense que c'est à cause de ce problème de longueur que le décor et l'action peuvent finir par être soûlants. Heureusement que la fin rattrape un peu le tout.
Enfin, beaucoup parlent des effets spéciaux ratés. Certes, dans certains plans furtifs, l'incrustation par ordinateur de l'alien est juste immonde. Mais dans les plans où on le voit longtemps, franchement ça va. Et puis on ne juge pas un film à ses effets spéciaux, j'veux dire, les effets spéciaux c'est un petit plus qui fait plaisir quand il est bien exploité, mais ce n'est absolument pas un critère de jugement de film, c'est trop superficiel.


Au final, on a une suite un peu bâtarde qui ne ressemble absolument pas à une suite, mais qui paradoxalement rentre super bien dans l'univers d'Alien. Je constate que le 2 comme le 3 se sont tous deux inspirés du premier opus en en tirant les aspects les plus intéressants pour les développer chacun à sa manière. Cela conforte mon avis disant que le premier Alien est surtout un très bon socle à suites, de par le fait qu'il pose avec minutie un univers qui se laisse volontiers à être exploré.
Mes hommages vont cependant à Alien 2, qui est le plus fun et le plus prenant de la saga, tout en apportant son lot de scènes de tension; ainsi qu'à Alien 3, qui est le plus sombre et le plus profond, certes mal construit et terriblement inégal, mais dont le climat anxieux et les images fortes restent en tête, et achèvent de construire un univers cinématographique fascinant; cette espèce de cadavre exquis du cinéma américain : la saga Alien, où plusieurs grands cinéastes sont venus chacun apporter leur petit grain de sel, tout ça tout ça.


(Quoi y en a encore un après ? Mais elle est pas morte la meuf ? Qué 8ème clone de Ripley ? C'est réalisé par un français ? Le mec qui a fait Amélie Poulain là ? Damn...)

burekuchan
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le 25 mars 2016

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burekuchan

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