Caché

Après le flop commercial de Mea culpa (465 244 entrées pour 15,9 millions d'euros de budget), Fred Cavayé s'était aventuré vers la comédie. Tout d'abord avec une énième comédie avec Dany Boon (Radin !, 2016), puis avec un des multiples remakes de Perfetti sconosciuti (le sympathique Le Jeu, 2018). Si bien que l'on se demandait si le réalisateur allait revenir vers quelque chose de plus sérieux. Au contraire de l'action, ce retour se fait par un drame en quasi-huis clos se déroulant durant l'occupation.

Adieu monsieur Haffman étant l'adaptation d'une pièce (Jean Philippe Daguerre, 2016), le peu de décors n'a donc rien de très étonnant. Ainsi, le film se concentre sur la bijouterie, le quartier même et ensuite sur des lieux spécifiques (la blanchisserie où travaille Sara Giraudeau, les prisons, le bureau du commandant nazi et le club). On ressent très rapidement l'atmosphère pesante de l'époque, faites de suspicions et de peur (de la délation, de la déportation et d'autres choses). Les personnages de Gilles Lellouche et Giraudeau sont dans un entre-deux. Ils ne sont pas juifs et n'auront donc pas de souci durant cette période.

Mais il y a un hic : le fameux monsieur Haffmann (Daniel Auteuil). L'ancien propriétaire de la bijouterie qu'a racheté le mari est juif, il a laissé sa famille partir "en sureté", mais n'a pas pu s'en aller lui aussi et se retrouve donc coincé. Dans un premier temps, le but sera de le cacher aux yeux de tous. Mais le temps passe et certaines choses vont entrer en compte, au point de montrer la part la plus sombre du personnage de Lellouche. Le genre à vouloir bien faire, mais tombant dans les dérives les plus crasseuses de l'humanité jusqu'à l'inacceptable. Une scène s'avère d'ailleurs radicale, montrant toute la bestialité refoulée du personnage, au point de se demander si c'est la première fois ou s'il y en aura d'autres. A partir de ce moment précis, quelque chose se casse définitivement entre Lellouche et Giraudeau, mais aussi avec le spectateur.

Toutefois, l'arc autour de madame Mercier et monsieur Haffmann est intéressant car semble retranscrire le peu d'humanité qu'il reste de cette époque. Tout part d'un mensonge pour aller vers une relation de confiance avec ses hauts et ses bas. Là où il n'y en a plus pour eux avec le mari et associé.

On peut regretter que la réalisation soit moins inventive que sur les films d'action du réalisateur (on est sur un côté un brin académique), comme que le final rappellera à certains un célèbre film des 70's. Néanmoins, le film peut compter sur son aspect huis clos réussi, des non-dits devenant des fardeaux et les trois acteurs principaux s'en sortent très bien (Daniel Auteuil par la tristesse qui se dégage de son rôle, Lellouche par la dualité du rôle et Giraudeau par une certaine légèreté qui va bien avec le personnages).