5 centimètres par seconde
6.7
5 centimètres par seconde

Long-métrage d'animation de Makoto Shinkai (2007)

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Une introduction aux intrigues à venir telles Your name ou Les enfants du temps pour les thématiques chères à Makoto Shinkai. La solitude, le mal-être des adolescents, les séparations imposées et le choix de vie qui en découle pour un passage à l'âge adulte douloureux.
Un film qui aurait mérité encore une fois une résolution moins abrupte. On passe sur la musique et celle de fin, également sur quelques dialogues bien peu profonds, même si on a compris que les questionnements des jeunes enfants sont souvent terre-à-terre, voire pour certaines sorties verbales, à la faute de goût, ramenant toujours le féminin dans une drôle de position. Et pour finir, d'un titre au manque d'ancrage sur son récit. On passera également sur les fameuses trois années de séparation, récurrentes chez le cinéaste, qui voit nos enfants de 13 ans, trois ans plus tard déjà adultes, travailler et indépendants. Et alors on passera aussi sur ce que le cinéaste dira lui-même, a avoir tenté la relation à distance sans succès. Est-ce à dire que l'amour avec un grand A serait de l'ordre du fantasme pour notre créateur japonais au thème pourtant majeur dans ses grandes déclarations d'amour ?


Trois ans auparavant c'est la Tour au delà des nuages, qui marque le premier long métrage du réalisateur et une certaine maîtrise à saluer, pour cet autodidacte. Son travail sur les teintes, et les visages qui sortent de l'usuel, son ambiance dépressive à souhait, mais en même temps peu d'élan et comme souvent chez lui un défaut de scénario et d'enjeu.


Ici, on apprécie un récit qui ne se perd pas dans ses chemins de traverse et on retrouve avec bonheur les mêmes tonalités dépressives et la simplicité du trait, où le travail sur le réalisme par de multiples détails des environnements, accrochent. Les décors de la ville ou de la campagne sont assez marquants par tout ce qu'ils convoquent de l'évolution pour Takaki. Avec ce si long trajet en train dans le premier segment, moment des premières retrouvailles, où on se surprend nous aussi à espérer que le temps passe plus vite, avec les flashbacks de l'enfance, de ses premières amours et de ses engagements, la neige en doux réconfort silencieux, la pluie qui accompagnera plus tard le cheminement et l'absence au monde de Takaki, ou le souvenir d'un cerisier en fleur et de tout les possibles qui se sont envolés. Même légers et parfois aux envolées émotionnelles faciles, on se surprend encore à faire le vœu, que par l'animation, la fiction prenne le pas sur cette relation déjà avortée. Si le second segment vient suggérer l'éloignement au monde de Takaki, le troisième viendra conforté la perte.


Entrecoupé de teintes lumineuses ou d'un ciel aux multiples couleurs s'ouvrant sur l'inaccessible, plutôt en signature qu'à répondre au récit, certaines scènes touchent par leur délicatesse et leur sobriété à retranscrire les premiers émois, sources d'angoisse et de non-dits.
On se rappelle à Melle Oyu de Kenji Mizoguchi qui par les seuls mouvements de retrait, souvent de dos, ou regard baissé, marquaient toute la difficulté à exprimer les sentiments et à en révéler le désespoir. Shinkai, réussi par ces quelques passages de profonde solitude, à rendre toute l'émotion attendue et tout comme Kim Jee Woon, Sinkai aime les trains, jouant de métaphores bien plus subtiles à marquer les ravages du temps que les voix off, récurrentes encore chez le cinéaste, qui, pour les plus âgés est largement dispensable.


Pourtant, en regard des précédents métrages vus de Shinkai, ceci expliquant peut-être cela, et un format court qui va à l'essentiel, le visionnage intéresse par les débuts du cinéaste et par le choix du dessin plutôt que du numérique à outrance.


Quatre ans plus tard ce sera aussi Voyage vers Agartha, qui se regarde avec plaisir. On apprécie le foisonnement, les couleurs, les détails de tout un monde, axant son récit sur la quête et le récit d'aventure plutôt que la romance. Un melting-pot coloré mettant en avant un ensemble de sites, de mythes et de multiples péripéties, pour ancrer son héroïne dans le monde violent des adultes.
Sans retrouver certains défauts flagrants de la Tour au delà des nuages où les décors restent figés alors que nos héros se déplacent, il reste quelques défauts de coordination. On regrette certaines facilités d'actions et de narration qui en oublient de nous éclairer ou qui zappent certaines évidences, balayées pour le suspense et la continuité du récit. Le personnage du professeur auto centré sur lui-même, cassera l'idée du soutien propre à ces récits mais opte pour un portrait de l'adulte de peu de confiance, assez jouissif, balayant cette notion de transmission fantasmée qui nous caractérisent, pour se rapprocher d'une certaine réalité bien plus égoïste.
Et puis, c'est aussi le bestiaire animalier et son aspect fantastique, qui rappellent aux grands moments de Myasaki mais à vouloir encore comparer les travaux des uns à ceux des maîtres du genre, si Agartha n'atteint pas l'excellence Chihiro, reste en filigrane la sauvegarde d'un environnement, des ses habitants et de ses croyances.
Et puis encore une fois, bien malheureusement, ce sera le portrait de cette toute petite fille... en parfaite ménagère de moins de 40 ans pour un autre gros Bémol. Chasser le naturel...

limma
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le 12 févr. 2022

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