Si je devais définir ce film en une onomatopée, ce serait un "meh".


Meh d'autant plus désolant que le film me faisait de l’œil, malgré tout, avec son exploitation sympathique de l'Alaska, de paysage ouaté emmitouflé dans son manteau neigeux. Quelle bonne idée que d'exploiter un endroit plongé dans une nuit interminable, trente jours sans soleil.
Et que ça commence bien, avec ce bonhomme peinant dans la neige qui s'enflamme sous les derniers rayons solaires. Quels plans, mes aïeux, un cargo emprisonné dans la glace, un soleil couchant sur la glace qui lentement enserre l'océan, cet infini, cette sensation d'isolement total.


Pire, renforcé par l'aéroport qui ne marche qu'une fois par mois et qui confine un décorum aux allures carpenterienne - j'ai beaucoup aimé cette ambiance The Thing qui me glace - dans un isolement rendu plus fort encore par les communications avec l'extérieur quasi-inexistante : une unique centrale électrique, un unique restaurant comme lieu de sociabilisation, une distance de 150 kilomètres avec la prochaine poche de modernité. L'Alaska, dur, froid, inhospitalier et qui finalement résiste envers et contre tout à la civilisation et repousse l'humain.


Vous dire si j'étais hypé, non ?


Allié à cela notons une photographie qui sublime l'isolement, qui magnifie la neige, des plans ingénieux qui soulignent la violence qui se déroule dans cette ville. Parce que oui, il va falloir que je vous parle du scénario. De son énorme potentiel complètement gâché, foutu en l'air. Et par des choix d'acteurs, de costumes, par des errances entre film d'angoisse et série B franchement gore. Je déteste les films qui, pusillanimes, se trimballent le cul entre deux chaises sans pouvoir se trouver.


Donc, dans une ville isolé en Alaska, Eben - Josh Hartnett, dont le seul talent est d'être le végétarien le plus sexy selon un magasine insignifiant - est un shériff bien intégré dans sa communauté, récemment largué par la belle Stella (Melissa George). Lorsque le soleil darde sur la petite bourgade ses derniers rayons avant que les habitants se voient plongés dans une nuit de trente jours, de mystérieux actes de vandalismes donnent bien du fil à retorde à notre bon Eben. Assassinats de chiens, sabotages d'hélicoptères, la paisible ville n'est pas au bout de ses peines. Stella de passage in da town se retrouve par la force des choses coincée dans ce coin paumé, obligé de composer avec ses incertitudes, son ex de shériff et le regard paternaliste de ces habitants presque indiscret, quand même. Non mais, de quoi je me mêle.


Sur ces entrefaites des meurtres se produisent, un type un brin caricatural est arrêté et du fond de sa cellule laisse échapper de ses dents gâtées des menaces à peine voilées : ils arrivent. Horreur et stupeur.


Bien, j'ai parlé du scénario, simple mais prometteur, j'ai parlé de la photographie plutôt somptueuse, des plans ingénieux - le massacre vu de dessus, le sang dans la neige extrêmement pertinent, certains plans privilégiant le non-vu, l'imaginaire, la composition d'une scène lorsque un membre contaminé se fera exécuter hors-champs tandis que l'on fixe la posture prostrée d'une Stella choquée.


Bien, je me suis blindé de ce côté là, je pense que ça justifie les attentes que j'ai pu mettre dans ce film et l'ampleur de ma déception. Déception première : le casting. Si les personnages secondaires restent corrects, sans être folichons, Josh Hartnett est le premier coupable de ma désaffection du film. Dieu qu'il joue mal, tellement qu'on dirait un croisement entre Kristen Stewart et Keanu Reeves. À chaque plan on en vient à penser qu'il se fiche complètement du film dans lequel il joue. Zéro investissement, zéro conviction, zéro émotions. Impossible d'avoir de l'empathie pour le bonhomme.


Deuxième coupable : le pinpin responsable des dialogues. Dialogues embarrassants dignes d'un téléfilm du dimanche après midi sur W9. Des phrases clichées, une amourette embarrassée entre Stella et Eben qui a autant d'expression qu'une planche (ébène, bois, planche... cale Hambourg). Dommage parce que la fin est touchante et intelligente, apporte une belle conclusion. Mais une cerise sur un étron, ça reste un étron couronné d'une cerise. Donc relativement indigeste.


Et le problème est là. Le fond du fond, c'est que David Slade semble balancer entre série B bien grasse et forte en hémoglobine et le film d'ambiance oppressant et angoissant. Bien mal lui en prit, selon moi, vu qu'on se retrouve dans plusieurs situation assez peu convaincantes. Même en faisant fi de certaines incohérences que j'imagine propres au matériel de base (pourquoi les vampires mettent autant de temps à trouver des gens dans une ville de quinze habitants, pourquoi ne foutent-ils pas le feu avant etc...) on se retrouve avec un big boss final qui m'a fait hurler de rire. Te dire, avec un copain quand on regardait ça, on faisait des vieilles vannes sur le cac 40 et les opa. Parce que le loulou, là, il ressemble juste à un pdg avec des dents sales et un peu d'acide dans le sang- rapports aux pupilles - et qu'il ne fait pas peur. À l'inverse, le premier antagoniste, même si il était un brin cliché, aurait fait un superbe vilain, d'autant que j'adore les situations dans lesquels le méchant enfermé est celui qui a la situation en main. Let us Prey le fait bien, avant de se saboter un peu vers la fin. Mais non, il faut qu'il claque lamentablement.
Puis les autres vampires, entre bouboule et crane rasé et son tatouage, ça vous fait rêver vous ? Et c'est dommage, parce que dans leur comportement et pour certains vampires, ils me faisaient rêver : impitoyables, intelligents, chassant en groupe. Du potentiel, mais pareillement, pourquoi ne pas en faire une menace plus éthérée, plus imprécise ? L'ambiance s'y prête, et autant organiser un seul déchaînement de violence, puis ensuite un jeu de cache-cache plus angoissant.


Je ne vais pas m'acharner à souligner le fait que le passage du temps est peu marqué (ça a été fait ailleurs) et je vais conclure en disant qu'un bon film, avec du potentiel peut être complétement gâché par des situation aussi prévisibles que ridicules et des acteurs peu impliqués.

Petitbarbu
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le 11 juin 2016

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