12 Years a Slave par trevorReznik
J’ai noté que pas mal de gens reprochaient à 12 years a slave son allure «académique». Mais moi je trouve que ce pseudo académisme (au niveau de la mise en scène et du déroulement de l’intrigue) assure une sobriété bienvenue pour traiter d’un sujet aussi douloureux. De toutes façons, c’est un faux procès : les nombreux plans fixes sur la nature ou sur les visages des protagonistes, d’une beauté saisissante, sont bien l’œuvre d’un grand réalisateur. Et après quelques jours de visionnage, preuve qu’on tient là un grand film, certaines scènes reviennent parfois vous hanter : celle du «semi-lynchage» de Salomon bien sûr, celle ou Epps lui ordonne de punir Patsey, celle où on la voit s’effondrer en arrière plan lorsque Solomon retrouve sa liberté (sans que lui-même ne l’aperçoive), celle où l’on comprend l’essence même du Blues quand on voit le héros extérioriser toute sa peine en joignant son chant à celui de ses compagnons (putain mais quelle scène! Peut-être la plus poignante du film)… Et il y en a beaucoup.
Steve Mc Queen parvient à décrire froidement l’inhumanité d’un système d’esclavage en décrivant extrèment bien les processus de peur et de logique économique (plus que la haine raciale) qui gangrènent tous ceux qui y sont impliqués, d’un côté comme de l’autre de la barrière.
Bon, sauf Brad Pitt. C’est un des deux (petits) points noirs du film : avait-il besoin de s’offrir (vu qu’il est le producteur) le rôle de gros cool qui va tout arranger avec son sourire à deux balles ? Le rôle n’est pas très bon mais serait bien passé s’il avait été joué par un inconnu. Le deuxième problème, c’est qu’on ne se rend pas du tout compte que Solomon vit un enfer pendant douze ans. Son calvaire pourrait tout aussi bien s’étendre sur quinze jours ou sur trente ans, ça ne se ressent pas à l’écran (un comble vu le titre !). Mais franchement, ça serait con de bouder le film pour ça.