12 ans d'esclavage est un film malade.
Non pas qu'il soit inutile: la cause qu'il défend et le portrait des hommes plongés dans cette formidable injustice est légitime. C'est un film malade car bouffie d'un académisme des plus dégoulinant de platitude: l'esclavage c'est pas bien, les racistes non plus et la violence c’est horrible...
C'est terrible d'avoir une œuvre aussi forte réduite à ce pensum sans passion.
Toute l’intensité de ce drame, tout cet enfer, toute cette monstruosité, réduit finalement à un ersatz digne de "La Case de l'Oncle Tom".
Les scènes s'enchainent passant d'humiliations divers subie par notre "héro" à la souffrance la plus abject, le tout entrecoupé de pub (pardon, de magnifique plan de paysage) pour la Louisiane.
Les acteurs sont bon, certaines scènes fortes mais parasitées par un récit sans architecture véritable.
Le film s'étale ainsi en un kaléidoscope d'évènements subis, de bouts de sketch tirés de la vie de ce pauvre homme dont on a volé sa vie, que pense t'il ? que fait il ? comment souffre t'il ? qu'est ce qui l'habite ?
quelques esquisses de réponse sans volonté d’immersion psychologique essayent d'y répondre durant ces 12 années (12 jours? 5 mois? 4 semaines? impossible d'y répondre tant le temps apparait dilaté et sans repère)
Voila ce qui me dérange ici: le protagoniste principal de l'histoire me semble plus un faire valoir neutre qui serait présent pour mieux donner d’intensité aux autres rôles, ou pour mieux faire éclater la folie et la lâcheté des planteurs, esclave du film et de sa mise en scène, on s'identifie peu à lui.
C'est beau, très beau, l'image y est splendide mais rien ne s'imprime durablement.
Qui se souviendra bien de ce film dans 5 ans, qui vibrera encore pour lui dans 10 ans ?
Un film à Oscar, oh que oui!
C'est manichéen, calibré pour plaire au plus grand nombre quid à lui gommer sa personnalité, travaillé dans la forme tout en étant aseptisé.
Enfin, d'une passion mole et surtout très lâche, la révolte n'y est jamais présente.
12 ans d'esclavage n'est décidément pas ce brulot, cette œuvre tant attendue sur l'esclavagisme, génocide humaniste qui sévi encore de nos jours.
En attendant, relisez Racine, ou revoyez la série tirée de cette œuvre, le propos y est bien plus intense
Cyann_Kairos_De
4
Écrit par

Créée

le 4 mars 2014

Critique lue 1K fois

20 j'aime

3 commentaires

Critique lue 1K fois

20
3

D'autres avis sur 12 Years a Slave

12 Years a Slave
Eren
4

Kid...napping !

L'académisme apparent de ce film est une énigme et une évidence à la fois. McQueen accouche d'une mise en scène aussi louable que discutable. Il déploie également un casting palliant le masque de ses...

Par

le 20 févr. 2014

81 j'aime

13

12 Years a Slave
guyness
4

Soupires en pire

A l’angle de la Canebière et de la rue Vincent Scotto (qui donne sur Belsunce), au numéro 37, trône les lettres fluos du cinéma "Variétés". Le patron du cinéma traine une réputation peu reluisante...

le 16 févr. 2014

79 j'aime

59

12 Years a Slave
Hypérion
4

L'argument "Based on a true story" ça ne suffit pas.

Quoique @Before-Sunrise aie d'ors et déjà dit l'essentiel de ce que j'aurais pu gribouiller sur 12 years a slave, je vais me fendre de quelques lignes parce que bon, un oscar de meilleur film pour...

le 3 mars 2014

77 j'aime

20

Du même critique

12 Years a Slave
Cyann_Kairos_De
4

2h15 d'esclavagisme avant la pub...

12 ans d'esclavage est un film malade. Non pas qu'il soit inutile: la cause qu'il défend et le portrait des hommes plongés dans cette formidable injustice est légitime. C'est un film malade car...

le 4 mars 2014

20 j'aime

3

Batman - Le Défi
Cyann_Kairos_De
5

la marche errante de l'empereur

Ni mauvais, ni excellent, "Batman le défi" laisse perplexe tant le film est bancal et paradoxalement traversé d'idées géniales. Il est assez compliqué en somme de créer un film de super héros...

le 1 mai 2014

15 j'aime

1

Le Hérisson dans le brouillard
Cyann_Kairos_De
9

Critique de Le Hérisson dans le brouillard par Cyann Kairos De Ligre

Toute l'âme onirique russe est contenue dans ce petit bijoux de poésie. L'histoire est d'une simplicité déconcertante: un ours, assis à côté de sa cabane/sauna, attend que vienne lui rendre visite...

le 27 févr. 2014

15 j'aime

1