Dans ma série élément d'analyse voici cette fois-ci mes réflexions sur cette oeuvre du duo Christin Bilal


Titre : Les phalanges de l'ordre noir


Auteur : Pierre Christin et Enki Bilal


Série : Légendes d'aujourd'hui


Publication : Pilote


Publication album : Dargaud 1979


Sources : H. Filippini Dictionnaire de la BD


Album utilisé : Réédition 2000 des Humanoïdes associés sans modification à l'exception du lettrage de la couverture et du 4° de couverture.


Eléments de critique externe:


Éléments d'analyse :
Conçu, selon les auteurs comme une réflexion sur l'émergence du phénomène terroriste, (E. Bilal remarque que l'année de publication correspond à celle de la création du groupe Action directe ). On peut également remarquer qu'une grande partie de l'action se déroule en Italie à l'époque dite ''des années de plomb''. On remarque une allusion directe à l'assassinat d'Aldo Moro.
P44 1/1 :
« Di Manno et Avidsen, eux rencontraient de jeunes mecs qui leur riaient au nez...
Terroriste 1 : Et Alors, Pépé qu'est-ce que tu veux que ça nous foute que la vieille extrême-droite se réveille ?...
Terroriste 2 (fille) : Après l'exécution exemplaire de Moro, c'est un peu tard pour occuper le terrain...
Terroriste 3 : De toute façon, tout ce qui sape les fondements de l'état est bon à prendre... Alors, nous vos salades, rien à foutre... Démerdez-vous... »


Si l'œuvre à l'instar de séries plus classique comme Yoko Tsuno exprime la confrontation d'une époque avec la rémanence d'un passé refoulé, l'ouvrage de Christin / Bilal témoigne d'une évolution importante de la BD durant la 2°moitié des années 70 qui consiste à renoué avec une fonction de chronique du temps présent, tandis que parallèlement la BD remet en cause ses archétypes narratifs.


Les premières pages (7, 8, 9, 10) presque muette mettent en scène le massacre d'un village espagnol par des nostalgique du régime franquiste. En perpétuant cet attentat ses auteurs espèrent stopper l'évolution historique qui remet en cause l'immobilisme du franquisme. Le massacre effectué correspond à la répétition d'une scène primitive destinée réaffirmé l'immobilisme historique.


P 9 1/ 1, 2, 3 :
Vielle femme : « ! Han regresado !
Charles du Busquet : Tu as raison vieille, nous sommes revenus ! … Mais cette fois-ci... //(il l'abat) …je ne te raterai pas... »


On peut penser que l'album correspond aussi à une étape de la déconstruction du récit d'aventure.
– Le récit adopte un rythme heurté multipliant les temps morts
– On perçoit le désenchantement des personnages confrontés dans leurs vieillesse aux idéaux de leur jeunesse.
– Le poids du temps qui passe, l'attente l'errance à la poursuite de fantômes qui sont des doubles d'eux-mêmes.


Les personnages se présentent comme des démystification complète du modèle héroïque classique dont ils ont à priori toutes les caractéristiques.
– Ils quittent tout pour se lancer à l'aventure
– Ils défendent une cause juste qui dépasse leurs cas particuliers et implique l'ensemble du monde.
– Ils traversent le temps.
– Ils exercent des professions « haut de gamme » et possèdent une foule de compétences diverses.
– Détenteur de la vérité ils sont incompris des institutions qui les pourchassent incapable de distinguer des méchants.


Caractéristiques que les auteurs s'attachent à détruire systématiquement :
– Leur résistance au temps se fait au prix de la destruction des corps sous les ravages du temps.
– L'idéal est de plus en plus mis en doute du début à la fin.
– La frontière entre le bien et le mal se brouille de plus en plus jusqu'à disparaître à la fin, quand le narrateur constate qu'ils ne sont guère différents de ceux qu'ils traquent.


P 80 2/2 et 3/1 :
« Vieillards infâmes observés par d'autres vieillards peut-être tout aussi infâmes... // sans doute méritaient-ils l'enfer et sans doute le méritions-nous autant qu'eux... »


Influence littéraire ?


On peut supposer l'influence d'un auteur comme John Le Carré qui durant la deuxième moitié des années 70 publie sa trilogie Georges Smiley (« La Taupe », « Comme un collégien », « Gens de Smiley ») dans lesquels l'auteur il assimile l'activité des services secret à l'inconscient d'une société.

JLP_2
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le 24 mars 2019

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