Une obsession humaine sur 50 ans, James Stokoe redonne à Godzilla sa grandeur

Après les résultats contrastés des précédents albums de Godzilla publiés par Vestron, dont le catalogue repose plus sur l’exploitation en comics de gloires de la culture pop que sur la recherche des titres révolutionnant la bande dessinée (et après tout pourquoi pas), la découverte de ce nouveau titre n’aurait pas dû être une priorité.

Et pourtant, présenté comme le meilleur titre sur Godzilla jamais réalisé, signé par un auteur rare et au vrai trait de pinceau, James Stokoe, parier à nouveau une pièce sur ce Godzilla ; The half-century war semblait aller de soi.

Publiée en 2012 sur les terres US, cette mini-série mérite bien le coup d’oeil, et bien plus, car elle s’éloigne des autres productions thématiques plus récentes mais moins marquantes, en se focalisant sur le parcours du lieutenant Ota Murakami à travers un demi-siècle à tournoyer autour du grand Godzilla.

Une mini-série qui commence fort, par la destruction de Tokyo en 1954, restant fidèle à l’opus fondateur mais qui va se poursuivre au fil des étapes chronologiques et géographiques. Accompagné de son fidèle ami Kentaro, Ota va ainsi rejoindre l’Anti-Mégalosaure Force, organisation militaire japonaise qui a à ses débuts pour but de s’opposer à Godzilla, avant de revoir ses objectifs face à leur impuissance contre le monstre reptilien puis contre l’arrivée de nouvelles créatures.

En adoptant le point de vue d’Ota, la série met ainsi en avant un basculement évident face à ces monstres, d’un désir de revanche à une certaine acceptation, sans oublier un certain abattement tout naturel. Que peut l’homme contre ces forces de la nature ? Mais la série de James Strodoe rajoute un élément à hauteur de sapiens, avec un appareil technologique crée par un dissident de l’AMF et en partie responsable des épisodes de confrontation destructrices entre les monstres. Une histoire entraînante mais qui ne se conclut pas de manière suffisamment marquée (il aurait été difficile d’accorder la victoire à Ota), et dont le divertissement pop est suffisamment mis en valeur par des planches spectaculaires.

James Stokoe arrive ainsi à merveille à rendre le pouvoir de destruction de Godzilla puis des autres créatures de la licence, notamment grâce à un épisode introductif saisissant. L’auteur canadien a ainsi un coup de crayon très expressif, minutieux dans les décors et leurs destructions, avec une vie dans les mouvements et les expressions suffisamment exagérés. Une petite influence de James Howlett (Tank Girl, Gorillaz) peut lui être accordée, dans une même énergie au creuset du comics et du manga, un mélange tout à fait réussi.

James Stokoe arrive ainsi à offrir une histoire malgré tout divertissante, qui ne renouvellera pas l’approche de Godzilla mais qui consolide sa force grâce à la présence d’Ota. Face à la figure monolithique et mythique du dinosaure mutant, le moucheron Ota arrive à exister, avec ses forces et ses doutes, ses espoirs et ses échecs. C’est l’histoire d’un combat qui semble perdu d’avance, d’une obsession d’un demi-siècle, servie par une esthétique réussie, minutieuse, fouillis et expressive, tout à la fois et même plus.

Et qui prouve qu’en offrant à Godzilla un auteur de talent et de l’espace pour développer son histoire on peut arriver à de très bonnes œuvres qui ne font pas que capitaliser sur un mythe de la pop culture pour soutirer de l’argent aux curieux et aux fans.

SimplySmackkk
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le 23 mai 2023

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