Trop tôt pour mourir
6.3
Trop tôt pour mourir

Album de Dosseh (2022)

Lacrim 2022 mais avec plus de storytelling

Introduction, premier paragraphe


Si Dosseh est né dans la fameuse période maudite du rap français, ce dernier a finalement réussi à faire son petit bonhomme de chemin au fil du temps.

Entre featuring concluants (Booba), piano-voix portant sa voix à un nouveau public (Habitué) et storytellings percutants (Flemme de regarder sur Deezer les titres), le natif d'Orléans a fini par construire au fil du temps une fanbase solide, en tout cas suffisamment pour apporter à son label de nombreuses certifications. C'est une belle histoire, celle d'un rappeur qui a fini par accoucher, dans la douleur du travail et dans la résilience, d'un beau bébé lui permettant de vivre convenablement du rap.


Toutefois, on sentait déjà à l'époque du premier album Yuri qu'il semblait compliqué pour Dosseh de concilier tout ce qui faisait son identité : si les collaborations françaises étaient des réussites, tant sur le plan commercial que musical (?), les collaborations américaines étaient au mieux inintéressantes, au pire des ratés quasi industriels. On se rappelera malheureusement tous du featuring avec le fameux Young Thug. En regardant le clip et en écoutant le morceau, on se demande encore comment le prix d'une Rolex a pu passer dans cette collaboration.

Mais cela se ressentait surtout sur le second album Vidalossa, projet dirigé par Michael Bay (ici, le fameux Oumardinho) mais écrit par Nicholas Pileggi (ici, Dosseh, mais la métaphore me semble naze, vous me direz).


Des collaborations dignes d'un trio Benze - Mbappé - Giroud


Si Vidalossa était donc, de l'aveu même de Dosseh, un blockbuster qui essayait de remplir un cahier des charges, Trop tôt pour mourir se veut lui moins réfléchi, c'est en tout cas ce qui semble être assumé par le rappeur quand il parle de son dernier projet.


Si absence de calcul il y a, un gros point d'interrogation se pose quand-même au dessus de ma tête à la vue des différents invités sur le disque, car à part Momsii, la liste des convives ressemble à celle de tous les autres albums rap français de 2022. La fête étant bien naze depuis 2/3 ans, ce n'est pas forcément réjouissant. Justement, en parlant de Momsii, ce dernier arrive à porter le morceau Branché. Zed , lui, arrive à faire le taff sur le remake de Ocean Drive de Lacrim (Smooth Criminel). Mais avant de parler de mauvaises choses, mentionnons le fameux beatmaker BBP qui passe faire coucou sur le morceau Branché : ce mec sait décidément faire de grandes choses.


Concernant les autres featurings, donc.

L'entrée de Leto sur le morceau N'écoute pas tes copines est catastrophique et malheureusement trop caractéristique de ce qu'il fait depuis longtemps. Le morceau avec Lacrim est insupportable, surtout avec ce refrain au gimmick horrible pompé sur amstagram piképiké colégram (on a déjà bouffé ce genre de truc sur Summercrack vol. 4 à l'époque et 3 p'tites chattes n'était vraiment pas un morceau) et la production du fameux Boumidjal. Il est encore plus décevant quand on sait qu'un autre morceau était dans les disques durs, que VLT était un bon morceau et que Oumardinho a préféré pousser Amsterdam qu'un autre truc.

Le morceau avec Dinos... bon bah le souci c'est que y'a Dinos dessus quoi, même si ça prouve encore que Dosseh est vraiment un meilleur lyricste que lui. Si son futur album Hiver à Paris est de ce niveau, ça risque d'être encore moins bien que Taciturne (aie).


Pour le reste, c'est juste anectodique, et même si j'aime beaucoup BBP, sa présence ne sauve pas vraiment le morceau avec Werenoi.


Oumardinho, on sait que Lacrim a sorti un bon album l'année dernière, pourquoi essayer de nous le rappeler sur l'album de Dosseh ?

Un autre point noir concernant cet album relève plus du pinaillage qu'autre chose de ma part, mais il a altéré mon appréciation de certains morceaux.

Déjà, comme-dit précédemment, le morceau avec Zed me rappelle énormément le morceau Ocean Drive. Trop, même. Évidemment, ce type de morceau existe mais le fait qu'Oumardinho soit derrière encore une fois m'interpelle.

De même, Branché sonne comme un remake de la fameuse trilogie Reda.

Et le feat avec Werenoi.

Je parle de cela comme d'un point noir mais la vérité, c'est que c'est un tout petit point noir. Un brin de maquillage et de déni suffisent largement pour oublier ces ressemblances. Pas très grave, donc.


Boumidjal tu nous saoules

Dans ce paragraphe, je deviens le hater originel et je cite les morceaux produits par Boumidjal. Vous acquiessez ensuite avec moi sur la qualité moyenne des productions qu'il a délivré. Je ne cite pas les morceaux quand boumidjal est présent avec + de deux autres producteurs.


  • Plus belle la vie, Plus belle la mort
  • Smooth Criminel
  • Fleur D'Automone, heureusement que la performance de Dosseh porte à elle seule ce morceau parce que sinon c'est cata, mais on en reparle après restez Branché.
  • N'ECOUTE PAS TES COPINES
  • AMSTERDAM

De beaux storytellings pour de belles larmes

Évidemment, la principale force de frappe de l'album réside dans trois mini ogives.


Le titre éponyme, produit par Tarik Azzouz et Mighty Mask, rappelle évidemment les ambiances Maybach Music. C'est une belle note d'espoir, forcément, un bel hommage aussi à ses parents et une belle musique de hussler. Si j'étais fumeur, j'aurais allumé un gros cigare moi aussi. J'aurais bien aimé parler des cuivres dans le morceau aussi car je les aime beaucoup mais je suis trop con pour savoir si c'est un saxophone ou un autre, désolé les amis.


Le récit de Djamel est évidemment un récit poignant puisqu'il parle des attentats du 13 Novembre vécus "au plus près". Encore plus poignant quand on sait que l'album sort en Octobre, que les procès ont eu lieu il y a peu de temps et que d'autres oeuvres parlant de ça sont dans les tuyaux, notamment le film Novembre. Le sound design y est sobre et efficace par ailleurs, habillant suffisamment le morceau pour rendre l'atmosphère tout de suite palpable.

Fleur d'Automne est le morceau dédié à la mère décédée de Dosseh. Le morceau parle de lui même et le rappeur reste suffisamment costaud et conscient de l'importance de son morceau pour porter sur ses épaules à lui seul ce storytelling.


Sur ces trois morceaux, on sent cependant que l'écriture est devenue très très légère. C'est un bon moyen pour toucher direct la cible en plein coeur et Dosseh assume pleinement avoir dégraissé son écriture tel Jay-Z mais je pense qu'on arrive à un point où ça en devient trop simpliste par moment. L'économie de moyen dessert parfois le texte et par extension les émotions qu'il veut transmettre. Mais comme il le dit lui même sur le morceau dédié à sa mère : "J'ai toujours trouvé les sons sur les daronnes un peu clichés. Un peu bateau, un peu facile, un peu tchip tsais".


Un (très) bon EP, un album qui souffre d'un ventre mou digne de Pierre Ménès

De manière plus globale, le début et la fin de l'album comportent de très bon morceaux.

Les 4 premiers morceaux sont terriblement efficaces et Dosseh fait ce qu'il sait faire de mieux, rapper à fond et ne pas faire de vocalises à la con avec Tiakola. Les 4 derniers morceaux sont aussi supers. Je me permets de mentionner l'Algorithme de Dieu : Benjamin Epps est pas capable de faire ça même en ayant révisé tout Grieselda. Twenty9 est co-prod sur ce morceau et sur 4 autres morceaux concernés par ce que je dis juste au-dessus : bravo à lui aussi.

Mais comme dit précédemment, les featuring sont vraiment indigestes et rendent le milieu de l'album trop hétérogène. Bien évidemment, Fleur d'Automne est la 8eme track, mais une fois ce morceau retenu, tout le reste...


Quitte à épurer grandement le texte, Dosseh aurait-pu aller jusqu'au bout de la démarche et épurer aussi la tracklist en laissant au public onze ou douze morceaux maximum.

Mais étant un grand insider de la musique rap en France (je connais quelqu'un qui travaille pour Raplume, il s'appelle Arthus), je sais aussi que plus les absences se font longues et plus les attentes sont grandes. Après 3 ans d'absence, revenir avec 12 titres aurait été probablement perçu par le public comme un gros molard craché à la gueule. Ce molard aurait-été mérité vu l'horrible public qu'est ce public rap, mais en attendant, le business reste du business et le client reste roi, surtout quand on parle de drogue h24.

Dommage, donc, mais à charge de revanche.



adriyain
6
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le 2 oct. 2022

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adriyain

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