Cela fait une petite dizaine d'années que les Red Hot Chili Peppers se font de plus en rares en termes de productions discographiques. Autrefois habitués à des sorties régulières et peu espacées dans le temps, les Californiens prennent aujourd'hui leurs temps, éparpillés qu'ils sont dans divers projets (entre autres Chickenfoot pour Chad Smith et Rocket Juice and the Moon pour Flea). Malheureusement, on ne peut pas vraiment dire que ces respirations de plus en longues (I'm with you remonte tout de même à 2011) soient spécifiquement salutaires pour un groupe dont les tendances de plus en plus pop s'avèrent de moins en moins convaincantes.
Pourtant, en ce qui concerne la mue des Californiens, d'abord s'est-elle faite dans un certain acquiescement. Qu'on se le dise, By The Way et Stadium Arcadium avaient su séduire leur monde malgré un style moins sautillant que par le passé. Preuve en est: chacun de ces albums est encore dans les esprits à l'heure actuelle. On ne pourra malheureusement pas en dire autant de leur avant-dernier rejeton, marqué par le départ du guitariste John Frusciante (partie vers des horizons électro) remplacé par un Josh Klinghoffer qui, aussi talentueux soit-il, n'aura pas su redonner du souffle à la musique d'un groupe en légère perte de vitesse.
The Getaway, car c'est de lui dont il s'agit ici, poursuit donc dans cette veine plus posée entreprise par les Red Hot voilà maintenant presque quinze ans, et cela n'est en rien surprenant. Là où le bât blesse c'est que le groupe le fait avec une inspiration toute fluctuante.
Qu'on se le dise, l'identité des quatre angelins reste parfaitement reconnaissable: Anthony Kiedis, sans être un chanteur hors pair, a toujours sa voix si caractéristique, à l'instar du jeu de Chad Smith et ses percutants coups de caisses claires. Idem pour Flea et sa basse toujours très funky, slappée de part en part et très mise en avant. Mais tout ces ingrédients sont dilués dans un marasme de mélodies trop souvent oubliables, les chansons en étant par conséquent rarement marquantes. Les choses commencent pourtant plutôt bien avec les quatre premiers titres, "We Turn Red" et "The Longest Wave" ayant même d'agréables refrains. Passe-partout, certes, mais satisfaisant néanmoins, bien que rien de comparable aux choses d'autrefois comme pouvait l'être "Snow (Hey Oh)". Puis au fur et à mesure de l'écoute, l'ennui commence à pointer le bout de son nez. Les paysages ici explorés sont à la fois cotonneux mais aussi soporifiques. Le groupe se fait même parfois horripilant, notamment sur le faussement énergique "This Ticonderoga" et ses guitares sonnant comme du plastique (le jeu de Josh Klinghoffer est par ailleurs d'un effarant ennui sur l'ensemble du disque, là où l'on sait quel fameux guitariste peut-être le bonhomme).
Soyons clairs, prises à part ou diluées parmi des titres plus marquants, les chansons de The Getaway auraient eu du sens. Réunies ensemble, elles se confondent en une toile tristement monochrome.
Ainsi, ce n'est pas cette nouvelle galette qui réconciliera les nostalgiques de l'ère Blood Sugar Sex Magik avec le groupe. Mais les Red Hot ayant eu un impact majeurs durant les années 90, on leur pardonnera aisément ce faux pas, en espérant un prochain disque qui, sans nécessairement renouer avec la folie créative de l'époque, saura se faire plus inspiré.