La réputation de public image LTD n'est plus a faire, tout les amateurs de post punk savent au combien ce groupe de John Lydon, ancien front man des Sex Pistols, a fait avancer l'éthique radicale qui était promise dans le punk. Car oui, le punk rock était selon moi une fausse révolution. Evidemment, elle a permise a de nombreux groupes talentueux de se révéler et d'aller bien plus loin que jouer des power chords un peu plus vite que d'habitude (The Fall, Joy Division, Wire..)

Mais avec ce projet, éminament plus complexe et avant gardiste on peut dire qu'on a ici la destruction du rock que le punk promettait. C'est a dire, au sens littéral, une deconstruction total des codes du rock. Si le premier album du groupe était encore assez proche du punk rock, il montrait déjà un goût prononcé pour les riffs angulaires et noisy notamment sur l'excellent "theme". Mais Metal Box ira bien plus loin : morceaux bien plus longs, basse dub en ostinato, riffs dissonants joués comme si l'on affutait un couteau, chant particulièrement anxieux. Metal Box deviendra vite la grammaire du post punk "artsy" avec son goût pour les expérimentations et ses atmosphères desespérées qui sont des hymnes pour l'âge industriel et atomique.

Mais c'est avec The Flowers of Romance que le groupe trouvera, selon moi, son magnum opus.

Il pose fondamentalement la question "mais qu'est-ce que le rock au fond?" est-ce uniquement une batterie, une basse et une guitare jouant des accords bluesy energiquement? Le blues n'a plus sa place ici en tout cas, totalement oblitéré par les groupes de krautrock qui prémacheront l'esthétique du post punk.

On s'attend a ce qu'il y est des riffs, en perspective ? Oubliez les riffs donc, car ici il n'y en a pratiquement aucun, ou alors ils sont très épars et servent avant tout a une chose : l'ambience de l'album.

Dès le début, sur "Four Enclosed Walls" l'album nous accueille de manière si peu hospitalère avec cette texture de synthé assez discrète et cette batterie qui entre et joue une caisse claire qui tape mais revient de manière très saccadée. Le chant scandé Lydon, quasi proche de la world music, est ici plus anxiogène que jamais. Quelques temps, quelques silences, et une texture très inquiétante arrive pour annoncer le beat tribal qui structurera le morceau... et annoncera la couleur pour le reste de l'album. Car oui, la batterie est l'élément rythmique, voir même musical qui sera le plus présent dans l'album. Le reste ne sera que des drones inquiétants, des samples de musique classique d'une tristesse infinie (sur"Under the house", les frissons !), et quelques lick de guitare beaucoup trop ponctuels. On se retrouve face a des beats monolithiques, froids, répétitifs très influencé par le jeu de batterie de Jaki Liebezeit de CAN.

J'ai personnellement l'impression d'entendre une énorme influence du morceau "fat mama kick" de scott walker : avec cette batterie disco impénétrable, ce drone inquiétant et une voix plus froide et désincarnée que jamais.

L'album est globalement vraiment déroutant pour ne pas dire effrayant.

Et pourtant c'est par son minimalisme et cette radicalité que brille cet album, ce qu'on pensait nous être acquit dans la musique rock est totalement anhilié, s'en suit une écoute attentive pour essayer de pénétrer dans cette album cryptique au possible.

On essaie de s'accrocher a la moindre note de guitare sporadique, a la moindre note de synthé, au moindre petit sample joué a l'infini. Et là il y a deux cas possible : soit on s'ennuie et on trouve qu'il ne se passe rien, soit on est totalement hypnotisé par cette ambiance délétère si proche de la musique industrielle. Chaque ligne vocal de Lydon nous envoute, le moindre pattern de batterie (ils sont tous incroyablement marquant, notamment celui de banging the door qui me rappellera celui qui ouvre l'album "the drift" de scott walker, encore lui.) nous hante pour les jours a venir et on fini même par trouver cet album groovy.

L'ambiance en devient délectable, addictive, face a cet ovni qui ne ressemble a rien de connu même encore aujourd'hui ! (imaginez un peu les réactions en 1981... la new wave commençait a battre son plein, on écoutait Blondie et The Police et peut être les talking heads..)

Un album brillant qui est peut être l'album le plus punk que Lydon nous a jamais sorti.

Alyta
9
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste A New Kind of Water : Un "autre" post punk

Créée

le 28 oct. 2022

Critique lue 46 fois

4 j'aime

Alyta

Écrit par

Critique lue 46 fois

4

Du même critique

Hear Nothing See Nothing Say Nothing
Alyta
9

Un tournant dans l'histoire de la musique extrême

En écoutant cet album on peut avoir l'impression d'écouter juste un très bon album d'hardcore très saturé... mais il s'agit bien plus que de ça dans les faits, cet album est plus ou moins la...

le 3 oct. 2022

2 j'aime

2

Dopesick
Alyta
9

l'oeil qui déteste dieu a encore frappé

Eyehategod et la drogue. La drogue et eyehategod sont indissociables de leur esthétique, leur musique faisant office de fix pour les fans de cette musique au son aussi massive et lente qu'une...

le 29 sept. 2022

2 j'aime

不思議
Alyta
10

Le succès obscurcie par l'ombre et la reverb

Akina Nakamori était peut être la plus grande idol des années 80, en tout cas une vraie star dans son pays. Acclamée pour les tubes qu'elle pouvait pondre mais surtout la sensation qu'elle offrait...

le 29 oct. 2022

1 j'aime

2