Inutile de faire durer le suspens (qui est mort depuis plus de 40 ans en fait) : Leonard Cohen n'a jamais fait aussi bien que son premier album qui reste une œuvre unique et sans égale, dont le caractère monolithique et intemporel demeure stupéfiant. Cela ne veut pas dire que les autres albums de Cohen ne soient pas intéressants, loin de là. A l'écoute de Songs From A Room on se rend même compte que c'est justement ce qui les rend intéressants : le fait qu'ils perpétuent l'étrange aura de la musique de Cohen en arpentant de nouveaux chemins sans chercher à se mesurer à l'ombre terrifiante de leur prédécesseur.

Et si Songs From A Room paraît, au premier abord, anodin et tout à fait ordinaire en comparaison de son aîné, c'est en réalité cette simplicité qui fait tout son charme. Leonard Cohen joue moins dans le domaine du mysticisme épique, et semble renouer avec une énergie plus rupestre et terre à terre. Les chansons sont presque bucoliques, elles n'ont pas cette puissance organique et transcendante qui caractérise les titres du précédent disque. Enfin il reste quand même des morceaux d'une intensité ébouriffante, notamment l'enchaînement The Partisan / Seems So Long Ago, Nancy, qui cloue sur place et vaut largement un One Of Us Cannot Be Wrong ou Master Song (voire plus). The Partisan est une de ces chansons qui filent des frissons à chaque écoute, tant les vibrations de la musique, du chant, sont transperçant, de simplicité, d'évidence.

Tout est loin d'atteindre de tels sommets, et certains titres du disque sont plus banals (en fait seul The Butcher est un peu lourd), mais il n'empêche que l'ensemble dégage une atmosphère apaisante, équilibrée, et semble former une version humble et feutrée de Songs Of Leonard Cohen. De toute manière, le fait que l'album contienne de véritables pépites le rend tout simplement indispensable, il est tout bonnement impossible de se passer de chansons comme The Partisan, Seems So Long Ago, Nancy ou Bunch Of Lonesome Heroes, et à une moindre échelle de Bird On Wire, Story Of Isaac, The Old Revolution et You Know Who I Am, des chansons qui touchent toujours autant par leur triste mais digne résignation, qui constituent la signature inaliénable de Leonard Cohen.
benton
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le 7 juin 2012

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