Pearl
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Pearl

Album de Janis Joplin (1971)

Dans la série « rock stars à destin tragique » nous nous pencherons aujourd’hui sur un élément de ce qu’on a appelé « la malédiction des 3 J » .
Jimi, Janis et Jim.
Même âge : 27 ans.
Londres 18/09/70, Hollywood 04/10/70 et Paris 03/07/71.
Trois symboles psychédéliques, trois overdoses, trois villes mythiques…
A quelques mois d’intervalle la grande faucheuse n’avait pas lésiné sur le recrutement.
Sacré sang neuf pour le Paradise Rock Blues Band !


Janis Lyn Joplin est née au Texas. Très vite attirée par les accents du blues, elle s’y réfugie et se met à le chanter avec passion et abandon. Dépressive, mal dans sa peau, pas très belle (elle est gentiment élue en 1963 « homme le plus laid du campus » par ses congénères), de bar en bar à San Francisco, elle screame, fait des rencontres, devient vite marginale, rebelle, junkie et alcoolique (adepte du bourbon Southern Comfort, elle en éclatera une bouteille sur la tête de Jim Morrison qui la harcèle).
Mais sur scène, c’est une bombe atomique, qui explosera (tout comme Jimi Hendrix) en 1967 au festival pop de Monterey, au sein du groupe Big Brother And The Holding Company avec lequel elle fera deux albums dont le fameux Cheap Thrills (1 million d’exemplaires en 1 mois !).
Totalement habitée, sans limite, la voix poussée jusqu’à l’extrême, ruisselante d’émotion, Janis Joplin est l’incarnation du blues-folk-rock dans ce qu’il a de plus pur et de plus instinctif.
Le mal être, la douleur, la communion avec le public, le don de soi, l’absence totale de calcul et d’artifice : c’est une pasionaria qui offre son corps et son âme à la musique dans ce qu’elle a de plus intimement humain.
Son corps et son âme contre quoi ?
Contre quelques éclairs d’amour intenses mais furtifs, pour elle, l’homme le plus moche de la fac, dont les abus ont continué de ravager le visage et les avants-bras…


« Sur scène, je fais l’amour à 25000 personnes. Après, je rentre à la maison, seule ».


Fin 69, le succès (la gloire, dirons-nous même) finit par lui procurer un semblant de sérénité qu’elle met à profit pour, d’une part, mettre la pédale douce sur les stupéfiants et la bibine et d’autre part, mieux choisir ses collaborateurs.
Elle réunit en 1970 un combo de vrais pros, The Full Tilt Boogie, son premier groupe à elle, avec lequel elle part jouer tout l’été à travers le Canada et les USA (dernière date le 15 août à Port-Arthur, sa ville natale…)
« Trouvez-moi un surnom qui me va bien » leur demande-t-elle. « Ruby ? Rose ?… Pearl ?… Pearl !». Désormais, ses musiciens et ses proches l’appelleront affectueusement Pearl.


Everything’s all right ! Et en plus, c’est Paul Rothchild, l’excellent producteur des Doors, qui pilotera l’enregistrement du nouvel album, qui démarre en septembre. Les échanges entre Paul et Pearl seront riches. Pour la première fois, quelqu’un prodigue à Janis des conseils artistiques : comment placer sa voix, comment explorer d’autres registres… De nouvelles perspectives, infinies, s’ouvrent. De son côté, Rothchild est bouleversé par cette femme, par cette osmose, par la force de ce qu’ils sont en train créer. Révélation réciproque.


Le 1er octobre 1970, Joplin enregistre a capella l’amusant Mercedes Benz dont elle a écrit les paroles (clin d’œil iconoclaste : « Oh Seigneur, achetez moi une Mercedes, mes amis roulent en Porsche, je dois me rattraper… » … or, on sait que la miss roulait en Porsche cabriolet - totalement repeinte avec des motifs psychédéliques, d’ailleurs).
Le morceau se termine sur des rires. Ce sera son dernier enregistrement.


Le 4 octobre 1970, dans une chambre d’Hôtel d’Hollywood, on retrouvera le corps sans vie de Janis Lyn Joplin, victime d’une ultime injection d’héroïne trop pure.


La plupart des voix étant en boîte, le groupe et le producteur savent que l’album doit quand même sortir. Car c’est un monument. Et encore galvanisés par le bonheur des sessions de septembre, ils travaillent sans relâche et réussissent à mettre au point les 10 chansons qu’il n’était pas question de sortir sous un autre nom que « Pearl ».


« Pearl », le plus beau disque de Janis Joplin. Pour toutes ces raisons.
Et pour toutes celles que vous découvrirez en trempant vos oreilles dedans.

RolandCaduf
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le 19 avr. 2021

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