Focus
7.5
Focus

Album de Cynic (1993)

How could I forget... such a revelation ?

Si vous êtes tombé sur cette page au hasard de vos pérégrinations sur le site, que vous n'avez jamais jeté une oreille sur Focus ni même aperçu un jour les oranges chatoyants de sa pochette (magnifique non ?), et que vous vous apprêtez sans plus attendre à aller lire une autre critique d'un album plus plébiscité sur SC, n'en faites rien : vos longues années infructueuses à la recherche du Saint-Graal, de la pierre philosophale, de l'anneau qui gouverne toutes les autres oeuvres musicales de l'humanité s'achève en ce jour.

Cynic est la personnification du génie.
Focus est le meilleur album de tous les temps. "How Could I" le meilleur morceau.

Découvert en première année de fac pour ma part, je l'ai passé en boucle pendant un mois environ (6/7 fois par jour parfois), avant d'être même capable de réécouter autre chose. Même les autres albums de mon top 10 actuel me paraissaient ridicules en comparaison, même les morceaux les plus intemporels semblaient ternes faces à la jouissance éprouvée dès les premières notes de "Veil of Maya"... Ne me demandez donc pas trop d'objectivité, j'en serais bien incapable.

Si vous n'aventurez jamais vos oreilles vers les contrées les plus extrêmes du Metal, l'étiquette choisie par SC peut légitimement vous rebuter : n'ayez crainte, si Focus est effectivement Death Metal, il est infiniment plus, et constitue certainement l'oeuvre la moins vindicative pouvant être affiliée au genre. Focus est Death Metal, Focus est Progressif, Focus est Jazz, Focus est atmosphérique, Focus est tout ce dont vous pouvez rêver.

En 1991 sort "Human" de Death, album révolutionnaire dans la sphère Death Metal qui fait passer le genre à l'âge adulte par sa technique ahurissante et ses constructions sophistiquées. Certainement en grande partie à l'origine du changement de cap stylistique du groupe, on trouve deux jeunes (20 ans) musiciens floridiens de formation jazz et classique embauchés aux postes de guitariste et de batteur par le maître à penser Chuck Schuldiner. Leurs noms : Paul Masvidal et Sean Reinert.

Libérés de leurs obligations à la fin de la tournée Human, les deux amis réactivent leur ancien projet, Cynic. Focus sort enfin en 1993 de l'esprit créatif de Masvidal, et les Deathsters découvrent, souvent avec rejet, que si Human était révolutionnaire, Focus l'est encore dix fois plus.

Incroyablement riche, usant de changements de rythme et de tempo constants, de signatures rythmiques complexes, et d'enchevêtrements de lignes de guitares en permanence, l'album est toutefois d'une limpidité effarante tant tout y coule de manière naturelle, tant les fluctuations sonores stimulent l'esprit de l'auditeur à tout instant sans jamais le brusquer. L'alchimie musicale est parfaite sur chaque seconde des 8 titres et 35 minutes qui composent l'album, pas de temps faible, pas de morceaux justes très bons : ici tout va du jouissif au divin.

Les musiciens sont bien sûr des dieux de leurs instruments respectifs et affichent tous un niveau technique ahurissant : les sensibilités jazz appuyées du jeu de batterie de Sean Reinert viennent étoffer sa maitrise de la vitesse, élément de base du jeu de tout bon batteur Death Metal, tandis que Jason Gobel (tout droit sorti de Monstrosity) nous laissera le plus beau solo de guitare jamais entendu sur le final d' "How Could I". Les prouesse solistes de Paul Masvidal ne sont pas en reste tant il est rare d'entendre quelque chose de ce niveau et de cette originalité (ses solos sont Jazz) dans le milieu Metal, pourtant pas avare en guitaristes de talent. Enfin on trouve à la basse Sean Malone, le virtuose, dont l'instrument sans frettes vient combler l'espace laissé par les six-cordes par ses sonorités rondes et caractéristiques, audibles à chaque instant.

Le chant est partagé entre les growls déchirés de Tony Teergarden (qui ne fait pas parti du line-up mais est crédité aux vocaux et aux claviers) et la voix voccodée de Paul Masvidal, créant une alternance vocale unique et pour moi pleine de sens. En effet Focus est un album fortement empreint de mysticisme, tant dans les paroles que dans l'opposition entre ces vocaux Death d'une part, exprimant à la fois la bestialité mais également la sensiblité de l'âme humaine, et d'autre part une voix robotique, désincarnée et apaisée, à travers laquelle on perçoit l'élévation spirituelle à laquelle aspire la musique du groupe, qui évoluera ensuite dans cette direction, vers plus de beauté et de perfection, mais délaissant de fait les violences de la passion humaine qui s'expriment encore sur Focus, créant cette atmosphère si particulière faite de dualité constante.

Jetez-vous donc si ce n'est pas encore fait dans les délices offerts par Cynic, dans la douceur de "Sentiment" ou dans la violence d' "Uroboric Forms", découvrez à quel point "Celestial Voyage" porte bien son nom et alors vous aussi vous vous demanderez à votre tour comment vous pourriez oublier une telle révélation, je l'espère...
Norn
10
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le 14 août 2014

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Norn

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