Drones
5.3
Drones

Album de Muse (2015)

Je vais commencer par faire la critique du concept album: je dois avouer que sur la forme, Matthew m'avait un peu saouler en voulant toujours donner un sens global à son oeuvre. Parce que je me suis dis que tout concept nécessite que le tout soit présenté comme un traité philosophique. Nous avons une idée force, un fil directeur et des arguments. La conclusion doit suggérer le contenu tandis que la conclusion doit trancher et venir cueillir le lecteur en le laissant bouche bée. Le problème quand on fait ce genre de chose, c'est qu'il faut qu'il y ait des moments avec des émotions différentes, des moments pleins de candeur ou de légèreté et d'autres moments plus dramatiques et plus forts. C'est en cela que je trouve que Matt en voulant faire un album conceptuel a dû faire taire sa virtuosité, son talent d'artiste par moment tandis qu'à d'autres il nous envoie du lourd: des chefs d'oeuvres qui côtoient des soupes pop. Ceci étant dit, le concept est très intéressant dans la mesure où Matt dénonce un système militaire inhumain: (et là je ne peux que le citer) «Le fil conducteur, ce sont les drones. Je trouve leur signification intéressante. Enfants, on voyait ce genre de véhicules volants comme des objets futuristes. Aujourd’hui, ils existent vraiment. Pour le moment, les drones ont été utilisés principalement pour faire la guerre et ont joué un rôle moins important dans les émotions humaines. Leur pilote n’est pas directement impliqué dans la mort et la destruction qu’ils sèment. Toute responsabilité est exonérée. » C’est cette disparition de l’empathie qui l’a intrigué et a inspiré le chanteur à écrire une histoire sur un personnage qui perd tout, est attiré par l’armée et se rebelle juste après contre un système qui l’a opprimé. Dans leurs versions les plus extrêmes, les drones sont une métaphore de la destruction effrénée du monde. L’exposant d’une âme psychopathe. Dans cette histoire, la planète est gouvernée par des drones qui sont utilisés pour mettre les gens au pas. Cela semble sombre, mais le personnage principal garde l’espoir d’un avenir différent. Au final, c’est ce qui nous motive. » Ca n'est que le premier degré de lecture car le second reprend un thème récurrent dans l'esprit du groupe et surtout dans les idées de Matt: Nous sommes tous fichés, observés et contrôlés sous couvert d'être protégé ou guidé par un système pseudo-démocratique mondialisé qui au final sacrifie nos libertés en échange de notre sécurité. L'aspect humain est totalement dérisoire voire ignorer selon qu'on se trouve de l'un ou de l'autre côté du miroir. Le troisième degré de lecture est celui le plus intelligemment pensé par Matt, c'est que chacun peut s'identifier aussi bien dans le concept tout entier que dans chacune des chansons qui ont une vie propre, indépendantes de du concept général. Matt a d'ailleurs confié que la chanson "dead inside" venait du fait qu'il s'était senti mort à l'intérieur lors sa séparation avec Kate Hudson. On a ainsi un raisonnement de type inductif: du particulier au général:" l'induction enrichit la conscience de nouveaux faits : elle est alors synthétique." De l'histoire personnelle de Matt nait l'histoire de cette recrue de l'armée qui fait naitre l'idée de fausse liberté des peuples contrôlés par Big brother (métaphore de la dictature parfaite). Aldous Huxley a d'ailleurs dit dans son oeuvre majeure intitulée "Le Meilleur Des Mondes:"« La dictature parfaite serait une dictature qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s'évader. Un système d'esclavage où, grâce la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l'amour de leur servitude ... »
En ce qui concerne maintenant, chaque chanson au niveau artistique, il va de soit que le tout, comme je viens de le démontrer ne peut être qu'inégal et en dent de scie.
Sans faire une critique pour chacun des morceaux, il va de soit que "Dead inside" est un titre accrocheur formaté pour le grand public et appâter n'importe qui. "Revolt" ne tient pas debout artistiquement. On pourrait entendre cette chanson dans "Barbie star du rock". Le titre "drones" est indispensable pour clore le concept album mais musicalement c'est très solennel et trop pathos pour moi. A côté de ça nous avons des titres qui sont, sans être des chefs d'oeuvres, sont très entrainants et assez travaillés comme "Mercy", "Aftermath" ou le très épineux "Psycho". Pour conclure, tout le talent de Matt et du groupe est concentré dans les chefs d'oeuvres que sont"Reapers","Globalist","Defector","The Handler".
Muse nous déçoit puis nous rattrape au vol, nous déroute puis nous comble pour nous laisser finalement à notre propre sort. Paradoxalement, il nous montre que le manipulé peut aussi devenir le manipulateur soit en en ayant pleinement conscience, soit en le subissant complètement. Pour terminer, je le cite: « Je sentais qu’il était important de montrer que tout le monde a le choix au final, explique Bellamy.Chaque individu libre a la capacité d’apporter sa pierre à l’édifice et de faire tomber les systèmes en place. Tel est notre message. » Etre ou ne pas être... 8/10 pour cet excellent album.

Eddy_Display
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le 24 juin 2015

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