CALIGULA
7.4
CALIGULA

Album de Lingua Ignota (2019)

Caligula était le troisième Empereur romain, né vers 12 et mort en 41. D'abord très bon, même populaire parmi son peuple, il devint peu à peu de plus en plus autoritaire, jusqu'à vriller en meurtrier (surtout envers ceux qui l'ont soutenu), qui aurait même mené une politique menant à la famine. Il finit tué par un groupe de prétoriens... Le Caligula de Lingua Ignota serait-il Alexis Marshall, leader du groupe extrême Daughters, qui a battu la chanteuse jusqu'à lui causer des lésions dorsales graves ?
Cet album sera le Catharsis de la chanteuse, l'exorcisme de ses violences conjugales, sans aucun filtre, dans un mélange unique entre une ambiance solennelle munie d'instruments funèbres (clavecins, violons) et spatialisation religieuse, concordant à une atmosphère globale de Cérémonie où Dieu est questionné sur sa responsabilité et Satan sur ses propositions de réparations.
Alors que la fureur surgit au milieu d'un vers murmuré, que le tambour se fait minimaliste avant qu'un violent emballement ne rappelle les souvenirs torturés, Ignota laisse sa voix transmettre toute la puissance de ce qu'elle a subit. C'est surtout à cause d'elle que certaines oreilles sensibles peuvent s'abstenir, tellement il n'y a aucune distance entre l'expérience et l'artistique dans les paroles : Ignota est dans une confession musicale totale. On pourrait se dire que c'est impudique, même exhibitionniste ; mais je pense que la chanteuse se veut porte-chant des violences conjugales, parce qu'elle sait que personne ne cherche à faire ressentir cette violence-même.
Et elle réussit. On est frappé, dans cet album. Mais on aime ça, parce qu'on comprend, déjà, que c'est passé, mais surtout que ce disque l'aide, en quelques sortes. La Musique peut nous sauver, y compris des violences domestiques, et c'est tout ce que l'on peut souhaiter à cette femme.
On lui pardonne alors le fait que "Caligula", c'est quand même une heure de cris intérieurs, comme extérieurs, sur un même thème dont le traitement, au fond, n'est pas renouvelé. Les mélodies ne sont pas forcément très fortement recherchées ; d'ailleurs la meilleure dans ce domaine, "Butcher of the world", reprend le thème principal d'"Orange Mécanique" (mais d'une manière magnifique). On lui pardonne, parce que sa musique n'est pas l'ostentatoire du fond ni de la forme ; le minimalisme technique, est là pour servir le propos autobiographique et appuyer son impact. Peut-être même certaines chansons, comme "Do you doubt me traitor", aurait été presque aussi efficace en capella !
Parce qu'à l'écoute de l'album, comme la chanteuse pendant des mois, on ne peut ni manger ni dormir. Parce que les Caligula sont partout.
Cela va de soi pour moi que je dédie mon petit texte aux personnes victimes de violences conjugales (n'oublions pas que des hommes aussi subissent cela...), force et courage à vous toutes et tous.

Billy98
8
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le 27 mars 2022

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Billy98

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