Si Count Basie nous avait donné un aperçu, Thelonious Monk met les deux pieds dans le plat avec Brilliant Corners que l’on peut qualifier de musique jazz intellectuelle. Ce disque n’est pas, à contrario des deux premiers albums jazz chroniqué, vraiment taillé pour la scène mais a été avant tout pensé pour l’enregistrement studio.

J’ai compté, si je fais 40 chroniques par an du livre 1001 albums. J’aurai fini dans 25 ans (mais oui ce projet va arriver à terme, j’y crois à mort) mais c’était sans compter sur des disques comme Brilliant Corners qui viennent compliquer la tâche. Non, la semaine dernière il n’y a pas eu de critiques de la rubrique 1001 albums tout simplement parce que je ne me sentais pas très chaud à l’idée d’attaquer cette œuvre. J’étais incapable de savoir si j’aimais ou pas, incapable finalement de cerner la musique de Monk.

Ce qui me rassure c’est que je ne suis pas le seul puisque qu’il a fallu beaucoup de temps aux musiciens pour enregistrer ce disque, incapable de jouer les morceaux tels qu’ils avaient été pensés. Bien sûr, Thelonious Monk ne pigeait pas trop pourquoi ses camarades galéraient comme pas possible puisque les enchaînements lui paraissaient le plus naturel du monde alors que ses compositions sont tout ce qu’il y a de plus complexe.

C’est peut être là le point fort mais peut être aussi l’aspect le plus rebutant du jazz. Chaque écoute apporte quelque chose de nouveau, on comprend un peu mieux le cheminement de la composition au fil du temps avant d’oublier l’heure d’après. Brilliant Corners est insaisissable et nous file entre les doigts. Par trop de complexité, on finit par abandonner le fonctionnement de l’œuvre pour se laisser guider par la musique.

Sauf que la musique du célèbre pianiste nous laisse sur notre faim ou plutôt, on reste insensible à son style que ce soit sur le sensible et délicat Pannonica dédié à son amie de longue date Pannonica de Koenigswarter (va prononcer ça) ou sur Brilliant Corners titre quasi légendaire pour sa complexité qui n’apporte pas une quelconque excitation. Les autres albums jazz avaient l’avantage d’être dédiés au live, on ressentait cette énergie et cette effervescence qui animait le groupe. Ici, on se laisse bercer par la fausse improvisation de ce big band talentueux.

Brilliant Corners laisse un vide et nous laisse la désagréable impression de passer complètement à côté. Pourtant il faut reconnaître que ce disque n’est pas du tout désagréable, au contraire. Cette complexité permet au disque cette sensation d’avoir quelque part la chance d’être écouté éternellement pour la première fois, une particularité trop rare dans la musique.
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le 13 févr. 2013

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