Amarok
7.7
Amarok

Album de Mike Oldfield (1990)

Etrange bestiole le Phoenix ! Un an après le déceptif "Earth Moving", programmé pour un plantage en règle, Mike Oldfield décide de revenir coûte que coûte aux sources de sa musique avec une longue pièce instrumentale, façon grande époque. Amarok se veut alors l'accessit vers le coeur des fans et plus, si affinités. A l'époque (nous sommes à la fin des années 80), Richard Branson flaire l'affaire juteuse. L'instinct marketing en plus, pourquoi ne pas nommer la bête Tubular Bells 2 voire Ommadawn 2 ? Pour faire court, personne n'attendait plus grand chose du compositeur endormis sur ses lauriers tubulaires en dehors d'un bon coup de pub lucratif.

Oldfield ne l'entend pourtant pas de cette oreille qu'il a musicale. Mais l'album est sur les rails. Dissensions. Engueulades. Divorce. La lutte avec la tête et les jamabes de Virgin atteint son paroxysme pour un résultat parfaitement anti-commercial et à contre-courant des modes. Le titre, unique, s'étale sur plus d'une heure. Les marketeux se rendent à l'évidence, impossible d'en tirer le moindre single. Mais le défi est aux normes. EN-NO-ORME ! Le finger-picking ravage l'introduction, travaille au corps. Et la partition réanime l'alchimie d'antan avec tout ce qui fait le génie de Oldfield : gimmicks addictifs, incursions dissonantes, lyrisme débordant, rythmes endiablés. Le tout, comme une évidence.

Amarok est à la fois troublant, euphorisant et pour tout dire hypnotique. Un barda de greffes audacieuses qui naviguent aux instruments (une soixantaine !) maîtrisés par cet homme orchestre qui n'abandonne au passage que la flûte et les percussions à ses comparses. En délaissant les synthétiseurs superflus (utilisés avec une extrême parcimonie), Mike Oldfield signe son retour chez les vivants et s'élève à un niveau tel que l'air se raréfie. Difficile à déloger. Le flot mélodique, d'une cohérence inouie, conserve une invention constante où se balladent rock baroque, folklore irish ou déjanterie tribale ; le charme envoûte immédiatement. La petite histoire retiendra également une savoureuse imitation de M. Tatcher et un passage codé en morse ("F*** off RB" à destination de qui vous savez) comme un doigt tendu bien haut vers ses fossoyeurs. Conséquence, Virgin lavera l'affront d'un coup de serpillère sur une campagne promotionnelle inexistante, tuant dans l'œuf tout espoir de succès.

Expérience monumentale, Amarok s'avère avant tout l'œuvre singulière d'un compositeur unique, qui le considère aujourd'hui encore comme son meilleur travail malgré l'étiquette d'échec commercial qui lui colle au boitier. Un paradoxe qui assiéra définitivement son statut de chef d'œuvre culte ; une coupe pleine, dont on peut toujours boire le calice jusqu'à l'hallali.

http://www.amarokprog.net/critiques_243_19.html
AmarokMag
10
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le 7 janv. 2012

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