Ce n'est jamais bon quand un artiste regarde en arrière. U2 n'échappe pas à la règle avec un album au titre si explicite. Un album Pop qui n'a pas rempli son contrat commercialement, la sortie du premier Bes Of centré sur les années 80 (véritable aveu de faiblesse), la crise de la quarantaine approchant, le cancer du père de Bono, la naissance en nombre de bambins au sein du groupe étaient autant de signes avant coureur que la fiesta des nineties était belle et bien terminée.

Maintenant, peut-on en vouloir au groupe de faire un album plus posé ? Bien entendu que non, la sobriété peut être élégante et intelligente. Et franchement, le dernier single en date (une B.O), The Ground Beneath Her Feet avait son ambiance et était des plus réussies. Mais voilà, à la sortie des années 90, on a vraiment l'impression que le groupe est vidé et n'a plus grand chose à dire. Bono passant plus de temps à s'acheter une conscience avec ses actions humanitaires Jubilee 2000 qu'en studio. Pourtant tout n'avait pas si mal démarré. Je reste effectivement un fervent défenseur du premier single Beautiful Day. Entre sa guitare me faisant penser au meilleur des premiers albums du groupe, son statut de tube, sans être si facile d'accès qu'il n'y parait, le fait qu'il vieillit encore extrêmement bien, je le considère franchement comme un bon classique. Alors oui bien entendu les paroles auraient pu être moins niaises mais c'est ainsi sur tout l'album. Il est d'ailleurs drôle de remarquer que bien que je considère le fond des paroles de l'album comme telle, je les trouve sur la forme plutôt remarquable poétiquement et s'enchainant agréablement. L'un des plus gros gâchis est d'ailleurs Stuck In A Moment, sur la mort du leader d'INXS, foutu en l'air par une rythmique d'une incroyable banalité faisant reculer Mick Jagger à poser sa voix sur le refrain. Tu as bien fait Mick !

Mais U2 réussit un tour de force là où Pop avait échoué, U2 reconquière les charts et tourne à nouveau sur MTV. Elevation reste la surprise la plus frappante. Chanson frivole mais qui a fait un carton ! On regrettera que seule la version single est écoutable. Tout comme Walk On qui gagne en finesse sur single, mais se révèle oubliable et assez exaspérante sur album. U2 a enregistré l'album dans leurs villas de la Cote d'Azur. Terminé les boites de nuits electro crades, ca sent maintenant les tongues et la piscine au bord de la méditerranée. Ils n'ont pas branlé grand chose, tout comme leurs producteurs fétiches. L'album a un son qui vieillit terriblement mal ! Le plus gros problème du disque est que la grosse moitié des titres sont poncifs, sans intérêt et mauvais. Jamais un album de U2 n'a été aussi fade, car si In A Little While reste sympa pour les paroles, on ne peut en dire autant musicalement.Les irlandais pondent leur plus grande suite de daubes de leur carrière avec Wild Honey comme pic. Même Larry s'est forcé à la jouer restant son morceau le moins aimé, et on le comprend ! Mielleux à l'image de son titre. Peace On Earth et When I Look At The World est dans le même ordre d'idée, anecdotique et à oublier. Grace termine l'album d'une bien mauvaise manière.

Dans ce marasme de médiocrité ressort toute fois deux titres. D'une part Kite, lettre d'adieu de Bono à son père sur son lit de mort. Le "I'm A Man, I'm Not A Child" vous arrache le cœur comme jamais. Rarement le groupe s'est autant ouvert. L'autre, c'est New York. Ode à la Big Apple. Prémonitoire un an avant l'affreux 11 septembre. U2 n'a pas perdu de son talent. On se demande par contre s'il y avait finalement de quoi faire un album. On se retrouve sur les bras avec un ou deux bons tubes et un ou deux bons morceaux. C'est peu...

Malgré tout, j'ai une certaine nostalgie pour cette période, car même si je n'écoute plus All That You Can't Leave Behind, j'ai un très bon souvenir de la tournée où le groupe avait retrouvé l'essence même de U2 perdu lors du Popmart qui allait dans tous les sens et parfois dans le grotesque. Dommage que l'album, dont il est question ici, n'a pas emprunté la même voie où U2 confond "essence" et effroyable "simplisme" à en oublier l'extraordinaire expérimentation de la décennie précédente. Si U2 renoue avec le succès commercial, cela se paie cash car les voilà dans la même cours que l'immonde musique de Coldplay... Une chute artistique des plus violente !
FlyingMan
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le 27 févr. 2012

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