Body
7.5
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Album de The Necks (2018)

J'écris au fil de l'album, en le réécoutant.


Le début est très très propre, avec un beau contraste. La contrebasse et la batterie pose le noir sur une toile. Viennent les gouttes de ride pour déformer tout ça, tandis que les overdubs de percussions, les nappes et les motifs de piano apparaissent plus comme des phares. Le motif de base se complexifie, et on sent une sorte d'inertie dans le processus, comme si tout était au final entouré d'eau. Je trouve Chris Abrahams particulièrement fainéant : son piano sonne merveilleusement bien, les notes choisies aussi. Là on entend des notes plus aiguës à la contrebasse, qui tombent lorsque la feuille qui les porte croule sous le poids de l'eau : elles se déversent et vont se déverser sans que l'on ait besoin de savoir quand. Dans l'oreille gauche cette percussion vient gêner l'endormissement, comme un insecte un peu obstiné... en tout cas elle arrive au bon moment. Bon là y'a des gars d'Europe de l'est qui parle fort dans mon train donc l'ambiance en est sensiblement modifiée, mais cette vue depuis la ligne N surplombant l'ouest parisien allait bien avec le côté dépressif reposé de la musique. Rien de triste ici, juste l'envie de ne pas sortir de cette spirale. Rien n'est venu embrouiller l'ordre établi par le trio depuis longtemps maintenant, ou est-ce ma perception du temps qui s'est modifiée. Une histoire de référentiel. Si je me concentre sur la ride tout semble instable autour d'elle. Si j'ecoute la contrebasse, c'est comme si un cœur battait pour faire vivre le reste. Si j'ecoute les nappes, je les attends comme la lumière d'un phare après une première révolution. Les harmonies développées me paraissent si simple que jouées en dehors de cette rythmique obstinée, elle ré-apprendraient à écouter les notes à n'importe quel écoutant. Par contre il faut dire que ces mêmes notes sont très necksuelles : peut-être pour ça qu'Abrahams m'apparaissait fainéant. J'ai faim. Ce passage-là c'est comme si on prenait la mémoire collective du groupe, qu'on lui explosait la tête, et qu'on fouillait délicatement les débris par temps de brume. On trouve un peu de tout, mais surtout on n'a jamais fini de chercher. Oh, là ça se pose, on est tombé sur un orgue digne de Silverwater. Il y a une veine d'argent. Le cœur se pose et tout devient plus minéral. Des notes de guitare annonce une sorte de crépuscule. Des percussions dans l'oreille droite m'ont dit d'aller voir ailleurs. L'orgue se propage par onde. Ne reste quelques secondes que les cymbales et la contrebasse. Rythme primordial. L'orgue revient. Repart. La grosse caisse tente réanimer le tout. Léger vibrato, Sa Ni Sa. Les choses se sont arrêtées de tourner. Ou plutôt sont très ralenties. On s'attend à une danse. Comme si le drone venait pour poser un rythme pas encore ici, ou que des musiciens s'accordaient. Le battement revient, accompagné des insectes. Nouvel accord qui se superpose au reste et invoque un nouveau rythme. La venue du crépuscule est retardée. Tout prend une teinte étrange, et ne reste que l'enveloppe du cœur. Tout est prêt. On peut entendre ce que le son incante. Viroflay, pff. La guitare semble grattée par un homme en transe. La pluie revient et offre un spectacle tout différent sur la même base. Chaque nouvelle note est un rythme en soi. D'un seul coup tout prend le rythme de la pluie. Le piano percussif tourne et tourne, incessamment. Le rythme mécanique offre une violence soutenue par une caisse claire vraiment vraiment vraiment distordue. On ne sait qui est où. Tout a changé. Et en fait, le soleil se levait. Là j'ai vraiment faim. C'est l'hiver qui défile à toute vitesse. Tout a hâte de renaître. Faim. Vivement l'arrivée. Pour mieux mourir. La transe est particulière. Ici le son est à la fois lisse et indescriptible. Maîtrise des overdubs qui frise le ridicule. Le métronome dicte tout, mais tout le reste échappe. Et ces Pa Ni Sa tournent et re-tournent. Rubati dissimulés. Le cœur peut encore être entendu. Bon, je suis à Versailles, c'est nul. Na na na na na na na na mother sky. Il y a quelque chose de japonais là, mais je ne saurais pas dire vraiment pourquoi. Peu de notes pour beaucoup. On dirait que certaines mélodies sont comme contenues et retiennent de se développer. C'est ce qui entretient une sorte de transe mélodie. Oulah, quelque chose vient de changer là. Une sorte de changement de son. De prise en intensité très momentanée. Voilà quoi. Là je devrais arrêter d'écrire mais on ne sait jamais. Boum boum. Boum boum. Boum boum. Boum boum. J'ai envie de headbang mais cette famille cheloue de l'est qui se met des mains au cul ne comprendrait pas. Ils sont bruyants ces cons. Non pas que je les déteste, mais j'ai faim. Il faut vraiment que je bosse mon neutral contre Falco. Ah mais pendant que je raconte ma vie ça a bien changé là derrière. Certaines nappes sont même carrément parties. Le boum boum qui donne envie de headbang est moins puissant. Ils fatiguent ces cons ? Ah marrant là la note conservée à la place de l'alternance. Ouais ça c'est cool à expériencer. Il faut écouter si vous l'avez pas écouté. Intéressant l'espèce de drone sur le Re. Saint-Cyr. Yesss ils se cassent. Et beaucoup d'autres gens. Je vais pouvoir écouter mon truc tranquille. Purée, ce que les vitres sont sales ! J'ai cru entendre un léger ralentissement mais peut-être que ce n'est que mon rythme cardiaque qui se pose maintenant que je ne redoute aucune main au cul. Tout s'arrête sur un accord saturé. Et là c'est le nouvel âge qui commence. Une sorte de gamelan entre Nature et Découverte et la musique de Halo. C'est très chouette, mais un peu plus faible que certaines pistes ambient que le groupe nous a déjà offert. Enfin, je me suis déjà laissé emporté lors d'autres écoutes. C'est juste moins génial. Comme tout le reste de l'album. À part peut-être le début. Oh. Un drone sec type sarangi ou crwth vient habiller le truc. C'est très précis. Moins génial, je maintiens. Disons que s'il s'agissait de leur premier album ce serait plus efficace. Je chipote ? J'aurais aimé les entendre sur des harmonies légèrement différentes peut-être. Quand on a une recette qui fonctionne il faut toujours essayer de remplacer un truc par de la noix de coco. Le déluge de cymbales est magnifique. Le roulement de caisse claire comme une petite cascade aussi. Mais la même idée dans un truc plus surprenant j'aurais pu atteindre quelque chose de bien plus puissant. J'aime les différents timbres. La puissance des basses qui arrivent du fond d'une grotte à des instants divers, comme réponse à ces carillons qui eux aussi prennent leur temps, c'est très puissant. Les superpositions de cymbales par intermittence aussi, pour créer du mouvement. C'est comme un tourbillon très lent. Comme de la lave. Mais de la lave froide du coup. Pensez à mettre un veston et un couvre-chef. Heureusement que le manque d'audace laisse place à un talent pour créer des intensités. Des vagues très lentes, comme la respiration d'une créature immense. Tout ça est facile à critiquer dans l'intention, mais difficile à décrire dans le résultat. Malgré tout ses défauts l'album porte quand même des choses excellentes. Subtiles parfois, rarement du génie. J'aurais aimé entendre les musiciens du second rituel s'accorder plus longtemps. Cet accord lunaire de tout à l'heure possédait une force magique. Là ce sont les multiples percussions et le fait que chacun joue après l'autre qui fait que j'ai été emporté sûrement. Je ne sais pas. Le soleil commence à m'aveugler. En tout cas il y a quelque chose qui relève du paysage dans ce dernier mouvement. Et moi j'ai faim. J'ai l'impression que l'album fonctionne moins bien une fois la surprise passée. Un j'aime si vous êtes d'accord. Finalement je trouve que plus on avance dans l'album et moins les choses sont intéressantes. Au début on découvre une ambiance qui même si elle recycle certaines harmonies chères au groupe reste très différente de tout ce qu'il a produit. En plus, je trouve pour le coup que ces traits de piano sont particulièrement adaptés à la transe. Ensuite vient un passage déconstruit bien que très réfléchi et qui est ma plus grande frustration. J'aurais aimé entendre plus de variations comme si quelque chose venait et partait avant que l'explosion ne se fasse. Le troisième mouvement créé la surprise (qu'on aime gâcher quand on écrit une critique >:) ) et est très bien construit en terme de son. On est sur du faisandé. Non pardon, du très bon. La fin paraît quant à elle plus facile. Si l'ambiance reste efficace, c'est parce que le groupe reste en terrain conquis pour ainsi dire. Mais avec des couleurs qui sont moins évocatrices et plus "dreamy" voire, osons, génériques.


Salut.

Créée

le 14 août 2018

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