Le meilleur live de Renaissance sans orchestre symphonique

Ce live à la BBC jouit en partant d'un privilège qu'aucun autre live peut avoir: l'enregistrement en concert par des maîtres du ”recording”. Dans les années 70 cela est vraiment très rare et en dehors de la BBC peu de radios s'adonnaient à cela et peu d'enregistrements live bénéficient d'une telle qualité de techniciens. Malgré les petites imperfections que soulignent Annie Haslam dans le livret, on a affaire ici à du grand live côté sonore. Et comme le disent les notes linéaires : “quelques anomalies peuvent exister”. On s'en fout ce live musicalement est superbe !

Échelonné sur des sessions de mai 75 à août 78 ( 4 sessions) nos oreilles en ont plein les tympans. Le plus vieux morceau étant une version magnifique de Ashes Are Burning. Ce titre est celui de Renaissance qui change le plus au cours des ans et des versions et je courre toujours après des versions live car elles sont souvent toutes différentes et géniales. Ici pas de solo de basse comme sur Carnegie Hall, des différences aux solos de piano et cette finale qui était le climax de TOUS les concerts de Renaissance. Il faut avoir vu Annie Haslam délivré son hallucinant solo de voix qui nous transperçait l'âme, le coeur et l'esprit , nous amenant dans une galaxie étoilée sur des ailes de feu. Ici le solo est tout simplement sublime, la voix part du fond de la galaxie (traité par les ingénieurs) et Annie caresse les étoiles de notes en feu, comètes dans sa voix d'ange. Cette version est unique juste incroyable, peut être un peu moins spectaculaire sur la longueur que certaines autres, mais putain cet espace dans la voix d'Annie , on dirait qu'elle arrive d'un voyage sidéral...

Dans l'économie de moyens elle nous livre une version différente et sublime.

Tout le reste des deux disques n'est que subtilités différentes des versions originales. Pour un fan qui connait parfaitement le groupe, c'est une délectation de voir surtout le talent incroyable de John Tout se réinventer si subtilement, l'ajout de quelques notes, un rythme qui change légèrement, des arpèges rajoutées...rien d'éclatant , que du grand art fignolé au fil des années...Très difficile à faire quand on a livré la perfection dès l'enregistrement studio...John Tout réussit à améliorer son jeu.

Si vous aimez ce groupe passionnément comme moi amusez-vous à écouter la version live de chaque titre et ensuite mettez la version studio, après un certain temps vous serez conquis. Même la basse de John Camp se réinvente.

Les deux joueurs les plus stables étant le drummer et le guitariste acoustique . Il est vrai que eux ont beaucoup moins de marge de manoeuvre tant le groupe est ”tight”.

Cet album en concert est le petit chef d'oeuvre de tous les live de Renaissance en concert sans orchestre symphonique. La musique y est plus directe et les morceaux sont joués souvent au moment de leur sortie à l'exception de Prologue et des 4 derniers titres du cd 2. Et ce décalage permet de voir l'évolution du groupe, des subtilités acquises et de la grandeur de ce groupe si souvent incompris, voire méprisé parce que symphonique. Mais qu'on se le dise Renaissance vole au-dessus de bien des groupes comme Yes et ELP par sa richesse musicale, par l'abandon de tics musicaux( comme les ennuyants solos de drums ou autres) et surtout par l'absence de guitare électrique. La richesse de la guitare acoustique de Dunford va bien au-delà des solos ennuyants à l'emporte pièce d'un Howe et le piano de John est un cours de précision et d'économie. Le son de la magnifique guitare acoustique de Dunford vaut celle d'un Hackett et écoutez Day of The Dreamer pour voir à quel point elle est cristalline et superbe.

Le fait de ne pas avoir d'orchestre symphonique permet de mettre en valeur les claviers de Tout et la basse de Camp. Cela devient particulièrement apparent sur le morceau de Novella: Touching Once . Si la puissance de l'orchestre symphonique ne peut être remplacée sur cette finale grandiose, et surtout le solo de saxophone du membre de l'orchestre (dont personne a retenu le nom) il reste que Touching Once offre des qualités live ensorcelantes qui tiennent toutes (ou presque ) dans les fabuleux claviers de Tout et le son de cette guitare acoustique et la mordante basse. Et quand le groupe décolle vers cette finale légendaire soutenue par ses musiciens de génie, la voix d'Annie n'a qu'à suivre les syntés triomphants et la marche implacable du band!

Un petit mot sur la longue suite Song Of Sherazade (25.30) dénudée. Le morceau fut vraiment construit autour de l'orchestre symphonique, il est fascinant de voir comment les musiciens réussissent à tirer leur épingle du jeu . Par moment on croirait que les claviers de Tout sont un orchestre symphonique. Renversant. Cet homme aurait survécu au sultan le plus tyrannique avec son talent. Un tour de force ! L'alternance entre doux piano et envolés de synthés sont d'une beauté ensorcelante. À déguster sous écouteurs...

De plus ce groupe est capable d'écrire des chansons qui vous restent dans l'oreille. Si Genesis a son : “I know what i like” Renaissance a lui: Midas Man voire aussi un Vultures Fly High (sur les critiques de rock) . Le jeu des synthétiseurs, la guitare acoustique et la le chant stratosphérique d'Annie sur Midas Man témoignent d'une virtuosité et d'une capacité mélodique renversante. Les cascades de piano de Tout y étant sublimes. Et cette note finale "..

Oui cet album vaut son pesant d'or, et est comme la BBC un trésor et dans ses voutes en dorment probablement bien d'autres.

Les groupes-rois sont morts Vive la reine BBC !

Vive la renaissance sur cd de ses concerts magiques!